L’équation vertueuse de la beauté
Photographie Lili Barbery-Coulon. Overdose?

L’équation vertueuse de la beauté

L’équation vertueuse de la beauté

Je reçois de plus en plus de questions concernant les formulations des produits de beauté et j’ouvre ici un débat qui n’est pas près d’être clos. Je m’engage à creuser ces sujets, à opposer les points de vue, à faire avancer les discussions. Je le promets. Je connais bien l’industrie de la beauté. Je la côtoie depuis 18 ans. On peut dire que j’ai donc atteint la majorité cosmétique 🙂 Pourtant, j’ai encore plein de questions sans réponses. Les jugements binaires qui consistent à opposer les « gentils » contre les « méchants » ne m’intéressent pas. L’industrie de la beauté nous ressemble. Elle n’est que le reflet de son époque. Si on veut la changer, c’est à nous de changer. La nature étant plus puissante que nos egos, la transition écologique va s’enclencher de gré ou de force et elle nous pousse à interroger tous nos comportements. Y compris dans la salle de bain. Si j’ai réussi à opérer de grands changements dans ma cuisine et métamorphosé mon alimentation en quelques années, avec une accélération majeure depuis le printemps dernier, j’ai encore beaucoup de mal à trouver le juste équilibre dans ma salle de bain. J’ai viré les produits ménagers toxiques. J’ai remplacé mon ancienne lessive par des produits plus sains pour l’environnement. Je ne prends plus de taxis depuis la rentrée (sauf la nuit pour des raisons de sécurité). Globalement, je consomme moins et j’arrive à limiter mes achats en fast fashion (deux pièces en tout cette année, rien depuis le mois de juin). Rayon beauté, en revanche, mon évolution est beaucoup plus lente. Ce n’est pas que je ne veuille pas aller vers des produits respectueux de l’environnement et de ma santé. Néanmoins, ma peau comme mes cheveux ne semblent pas toujours d’accord avec mon engagement écologique. Dans un monde idéal, j’aimerais trouver des produits qui répondent à toutes les attentes de ce cercle vertueux :

le cercle vertueux de la beauté selon moi, conçu par moi (Lili Barbery-Coulon) et réalisé par Bastien Coulon

Aucune marque à mon sens ne répond encore à l’ensemble des attentes inscrites dans cette roue. Aucune. Ce qui signifie qu’on est obligé de renoncer à certaines parts du camembert. A nous de réfléchir individuellement au renoncement le plus urgent et le plus acceptable. Sachant que le temps de réflexion dont nous jouissons n’est pas illimité : il est rythmé par le réchauffement climatique. J’ai défini et développé chaque point ci-dessous afin qu’on réfléchisse ensemble à des solutions. Ce n’est pas un article, c’est un bouquin ! J’ai hâte de lire vos enrichissements. Je le répète : l’idée n’est pas de se juger les un.e.s les autres, ni de s’attribuer des médailles, mais d’avancer ensemble sur ces questions. Je chemine et toutes mes anciennes croyances sont bouleversées… Pas simple.

Faire ce qu’on dit, c’est le minimum syndical pour un produit sinon autant ne rien acheter ! Pas bien compliqué lorsqu’il s’agit d’hydrater la peau. Un peu plus épineux quand on promet le ralentissement d’une chute capillaire, la fin des pellicules pour des cuirs chevelus stressés, une diminution visible des rides, une tenue longue durée d’un effet en maquillage, le contrôle de la transpiration sans irriter la peau, une protection efficace contre l’intégralité du spectre solaire, des boucles rebondies… Et je n’ose même pas aborder la question de l’acné. La vérité est que tout le monde vieillit et que si on avait trouvé un produit vraiment efficace contre les rides, les journalistes comme les influenceuses de la beauté (qui ont gratuitement accès à tout) ressembleraient à Benjamin Button. Ce n’est pas le cas. Idem au sujet des boutons : regardez le nombre de peaux à imperfections dans le métro ou dans la rue. Je suis certaine que la plupart des personnes qui ont régulièrement des boutons ont déjà dépensé des fortunes dans des traitements divers et variés, sans succès. Il existe bien des traitements hormonaux ou médicaux qui fonctionnent avec des conséquences affreuses pour la santé (je pense notamment à l’isotrétinoïne qu’on prescrit aux ados qui souffrent d’acné sévère ou aux pilules ultra fortes qui ont longtemps été à la mode pour dégommer les boutons avec les conséquences que l’on connaît sur la santé globale à long terme). Dans le domaine de l’antiride, il n’y a pas cinquante actifs qui ont fait leur preuve et ils sont rarement issus de la nature. Outch.

La solution : Il est peut-être temps de renoncer à certains combats esthétiques ? Je ne parle pas des pathologies qui défigurent ou handicapent le quotidien mais des petits défauts auxquels on accorde peut-être trop d’importance ? Notre quête de « performance » cosmétique ne fait-elle pas écho au système actuel qui pressurise plus qu’il ne libère ? Et si, on se contentait d’être soi ? Et si on acceptait nos rides, notre cellulite, nos imperfections, nos cuirs chevelus trop gras ou trop secs ? Et si on se servait de ces manifestations corporelles pour apprendre quelque chose de plus profond au sujet de nous-mêmes, sur notre peur de changer, de vieillir, de mourir, de ne pas être aimé.e ? Et puis, les imperfections qui ne sont pas de naissance sont aussi l’expression de notre hygiène de vie. Il n’y a pas que les produits cosmétiques qui peuvent nous offrir des « performances » esthétiques. Il y a ce que l’on mange. Il y a l’activité physique. L’équilibre hormonal et émotionnel. L’épanouissement personnel lié à son propre alignement. Il y a le pranayama (les exercices de respiration). Testez trois minutes de respiration du feu et vous verrez le glow miraculeux que cela donne instantanément. Il y a l’estime de soi qui change le regard que nous avons sur nous-mêmes. Il y a ce que nous faisons au quotidien et le sens que cela donne à notre existence… Aujourd’hui, l’étude de l’épigénétique prouve que l’on peut changer l’expression de ses gènes et ainsi jouer une partition de son ADN radicalement différente en diminuant son niveau de stress et en mangeant plus sainement. Tout ceci, on le sait bien, nous rend bien plus beau qu’une crème : il n’y a qu’à regarder nos visages nus après trois semaines de vacances. Je ne dis pas qu’il faut abandonner l’idée de se plaire lorsqu’on se regarde dans un miroir. C’est important de se trouver belle/beau. Je dis juste qu’il y a d’autres voies à explorer que celle des cosmétiques et qu’il faut peut-être revoir nos attentes à la baisse en matière de produits de beauté

Hum, vaste sujet. Un produit garantissant zéro réaction cutanée ou zéro risque d’allergie n’existe pas : dès qu’on met une molécule sur sa peau, tout peut arriver. Parfois, le problème ne vient même pas de la crème. L’irritation, l’inflammation, la rougeur, les boutons qui apparaissent peuvent être liés à un système immunitaire affaibli, des reins engorgés, un foie paresseux, un traitement médical en cours ou pas tout à fait éliminé par le corps, une mauvaise hygiène alimentaire, un trop plein de stress au travail, un deuil, une séparation, un jet-lag… Il y a mille facteurs qui peuvent provoquer une réaction cutanée. Mais il y a aussi des ingrédients qui favorisent ces réactions. Une huile essentielle (qui n’a rien d’une huile mais qui est l’essence d’une plante obtenue à partir d’une distillation à la vapeur ou d’une pression à froid pour ce qui concerne les agrumes) contient des dizaines de composants. Par exemple, une huile essentielle de rose recèle plus de 300 composants. Trois cents molécules qui font d’elles un actif puissant (la reine des fleurs) mais aussi trois cent alchimies potentielles avec la surface de notre peau. On dit toujours que les « vilaines » marques qui utilisent des actifs de synthèse font des économies sur notre dos. Leur décision d’utiliser des produits de synthèse n’est pas uniquement liée au budget. La vérité c’est que les marques sont toutes terrorisées par le risque de réaction cutanée (rougeur, brûlures, picotements, boutons…). Il n’y a pas pire qu’une plainte de consommateur ayant fait une réaction même de très courte durée. C’est LE critère absolu pour les grands groupes cosmétiques : ne pas provoquer de réaction. Du coup, ils investissent beaucoup d’argent dans les tests d’innocuité (certains tests de non toxicité sont obligatoires mais certaines marques vendues à l’international vont beaucoup plus loin). Pour éviter de prendre le moindre risque, ils se tournent vers des ingrédients de synthèse dont ils peuvent contrôler l’action sur la peau, des huiles « mortes » comme les huiles minérales issues de la pétrochimie qui forment un film occlusif neutre et ne risquent pas de stimuler la sensibilité cutanée. Parallèlement, il n’y a jamais eu autant de peaux dites « sensibles ». La pollution a beaucoup affaibli nos systèmes immunitaires, les vagabondages cosmétiques, les régimes alimentaires inadaptés, les pesticides que nous consommons malgré nous, le tabac et les excès en tout genre aussi. Pourquoi croyez-vous que les marques les plus célèbres vendues en pharmacie ont autant de difficultés à faire des formules 100% naturelles ? Parce qu’elles s’adressent aux peaux sensibles et atopiques et que ces peaux-là ne tolèrent plus rien, pas même de la cire d’abeille sur leurs lèvres. Encore moins du bicarbonate de soude dans un déodorant bio. Ces douze derniers mois, je me suis remise à tester des produits naturels, bio et – sur l’étiquette – absolument vertueux. Je l’ai fait avec enthousiasme et motivation. J’avais exclu cette catégorie au milieu des années 2000, lassée par toutes les réactions qu’elle provoquait sur ma peau. Je voulais à nouveau tenter des alternatives aux concentrés synthétiques qui ne m’ont jamais causé la moindre allergie et qui me font une très jolie peau. Patatras : j’ai à nouveau enchainé les réactions. Et même avec des marques naturelles qui revendiquent une tolérance extrême pour les peaux sensibles ! Je vous promets que je voudrais aimer les soins qui contiennent des huiles essentielles ou du 100% naturel mais très souvent, PAF, je me tape une tonne de petits boutons sous cutanés (un effet granuleux en surface). Les conservateurs jouent aussi un rôle important dans le problème. Avant, quand on utilisait des parabènes pour conserver les formules, ils étaient si efficaces qu’il suffisait d’en utiliser un pourcentage infime pour qu’ils protègent la formule d’une invasion bactérienne. Ils ne sont pas interdits dans les formules par la loi mais les consommateurs n’en veulent plus car ils sont soupçonnés de perturber le système endocrinien (cependant des études contradictoires disent qu’ils n’ont aucun effet perturbateur dans les cosmétiques, tout dépendrait de la taille du paraben : JE VOUS AVAIS DIT QUE CE NE SERAIT PAS SIMPLE !). Du coup, ils ont été remplacés par d’autres conservateurs (qui sont eux-mêmes soupçonnés d’être encore plus toxiques). Sauf que maintenant que tout le monde a écrit « sans paraben » sur ses flacons et qu’on a pu désigner un coupable, impossible de faire machine arrière. Comprenez-moi : je ne suis pas en train de défendre les parabens. Je dis juste que c’est un tout petit peu plus compliqué que ce que l’application Yuka semble désigner comme bon ou mauvais pour la santé. En outre, les nouveaux conservateurs sont moins efficaces, du coup, les marques sont obligées d’en mettre beaucoup plus. Et c’est là que vous allez comprendre pourquoi des réactions cutanées apparaissent : si on met beaucoup de conservateurs, on est sûr qu’aucune bactérie ne va attaquer la formule, même si un pot de crème reste ouvert dans une salle de bain près du radiateur. Problème : la crème est si bien protégée qu’elle attaque aussi les bonnes bactéries à la surface de la peau, celles qui constituent notre précieux microbiote. Impossible de connaître le pourcentage de conservateurs utilisés dans une crème : ces informations restent secrètes. Attention aux marques qui fanfaronnent et font la leçon aux autres concernant leurs formules : elles ne sont pas à l’abri d’une énorme réaction cutanée. Or, il suffit qu’une cliente fasse une fois l’expérience d’une réaction au bio ou au naturel pour qu’elle mette toutes les marques bio dans le même sac. Autre gros chapitre en matière d’innocuité : les peaux souffrant d’une pathologie comme le psoriasis, l’eczéma, la rosacée ou les personnes en traitement médical intensif (chimiothérapie, radiothérapie, etc…). Alors là, on entre dans des zones d’incohérences totales qui ajoutent beaucoup d’anxiété et d’interrogations à un moment difficile de l’existence. J’ai malheureusement tellement d’amies qui ont eu un cancer que je commence à connaître leurs besoins pendant une chimiothérapie. Leur short list de produits préférés est loin d’être bio. Même les plus écologistes d’entre elles ont du se tourner vers des marques vendues en pharmacie car elles ne toléraient plus aucune odeur. Certaines huiles végétales qui leur avaient toujours été bénéfiques ne suffisaient plus à hydrater leur peau fragilisée, des réactions cutanées se sont multipliées : il n’était pas question qu’elles aient à gérer ça, en plus du reste. Sauf qu’on leur répète à longueur de journée qu’il y a des ingrédients cancérigènes dans les produits qui leur conviennent. Comment faire ? Que doit-on répondre à une mère dont le bébé souffre d’eczéma si le seul produit que son enfant tolère contient des produits issus de la pétrochimie ? La culpabiliser ? Lui dire qu’elle est en train de coller un cancer à son fils ?

La solution : Faire comme on peut avec son histoire et ses besoins. Être à l’écoute de l’instant présent car la peau est comme nous : elle ne cesse de changer. Ce n’est pas parce qu’on a eu une intolérance à un ingrédient à une période donnée que cela signifie qu’on ne pourra plus jamais l’appliquer (même les allergies peuvent évoluer, dixit une ex asthmatique allergique aux poils de chat). La peau est un formidable organe qui enveloppe tout le corps physique : elle nous envoie constamment des messages qui nous permettent d’avoir une lecture de notre santé et de notre énergie. Elle nous renseigne aussi sur l’état de notre système immunitaire, celui de notre foie, de notre système digestif, de nos hormones et de nos reins. Faire un bilan avec un.e naturopathe (ou un médecin ayruvédique ou une autre discipline holistique qui vous parle) permet de connaître ses besoins et apprendre à renforcer ses faiblesses. Si vous avez la peau sensible, préférez les formules courtes (regardez la liste INCI au dos du produit, pas la liste d’ingrédients mis en avant par le marketing), évitez les huiles essentielles par voie topique, évitez les agents nettoyants moussants qui décapent, évitez tous les produits qui risquent de dessécher votre peau ou votre cuir chevelu, évitez aussi les produits avec parfum (bien qu’on arrive aujourd’hui à formuler des senteurs sans allergènes), fuyez TOUS les produits qui vous donnent une sensation d’irritation, même si on vous dit que « si ça pique, c’est normal, c’est le signe que ça fonctionne » : un produit ne devrait JAMAIS brûler ni irriter. La bonne nouvelle c’est qu’il y a une nouvelle génération de marques naturelles qui prennent en compte ces critères et avancent sur ces sujets : on est sorti de l’aromathérapie à haute dose pour entrer dans une ère d’ingrédients naturels beaucoup moins agressifs… Dernier point : privilégiez les packs airless ou stériles si vous avez la peau sensible. C’est plus hygiénique que de tremper ses doigts, pas toujours propres, dans un pot de crème. En outre, le fait qu’il n’y ait pas d’air en contact avec la formule réduit, en général, la quantité nécessaire de conservateurs. Il y a d’ailleurs des marques qui proposent des produits sans conservateurs. Enfin, si vous avez la peau sensible ou sensibilisée: réduisez drastiquement le nombre de produits utilisés au quotidien et essayez de ne pas mélanger les marques entre elles. C’est la multiplication des allergènes et leur combinaison qui finit par provoquer des inflammations.

On entre ici dans la subjectivité la plus totale. Je n’aime pas la sensation des huiles sèches sur ma peau. J’ai des copines qui les adorent. J’aime les baumes onctueux et réconfortants. D’autres préfèrent les gels aqueux. J’adore les parfums cosmétiques duveteux tandis que des amies à moi ne tolèrent pas la moindre odeur. Pour qu’un produit ait du succès, qu’il s’agisse de maquillage, de soins capillaires ou cutanés, il faut que la sensation à l’application soit agréable. Les marques disposent de grilles de satisfaction lorsqu’elles font tester des consommatrices. Elles observent le sourire au moment de la découverte du parfum, la sensation au toucher, le temps de pénétration du produit… Il existe même des machines pour analyser l’activité cérébrale pendant la découverte d’un soin ou d’un parfum ! En matière de produits pour la peau, la texture et le parfum sont les premiers critères qui vous donnent l’illusion de son efficacité. Si c’est agréable immédiatement, le/la consommateur/consommatrice a déjà l’impression que la formule marche… Dans ce domaine, les marques 100% naturelles ou tout bio ont encore du mal à s’aligner sur les marques traditionnelles qui n’hésitent pas à utiliser des silicones et tout un tas d’artifices synthétiques. Je me souviens quand je travaillais pour Vogue, au début des années 2000, il y a eu une vague de soins pour la peau qui vantaient la présence de nouveaux polymères de synthèse. J’ai même écrit des articles sur le sujet (quand j’y pense c’est délirant). On nous présentait ça comme une révolution positive : et c’est vrai qu’au toucher, c’était dingue. Des sensations veloutées ou élastiques, des effets filmogènes ou épaississants. C’était la mode des tubes de chantilly pour la douche, des masques en mousse… Personne ne se questionnait sur l’environnement ou la santé à long terme. Depuis, les laboratoires spécialisés dans le naturel ont beaucoup bougé et ont aussi dégainé des gommes (naturelles cette fois) qui peuvent apporter une texture moderne à une émulsion basique. L’étude des algues a explosé et a beaucoup enrichi les nouvelles textures. Néanmoins, je continue à trouver certaines crèmes bio complètement archaïques, voire repoussantes. Sans parler des parfums épouvantables noyés sous une grosse dose d’huile essentielle de néroli… Personne n’a envie d’appliquer une crème qui ressemble à une mayonnaise tournée, un produit qui roussit au contact de l’air ambiant ou un shampooing transformé en gelée compact au bout d’une semaine (tout ce que je raconte est du vécu)…

La solution : Il va falloir apprendre à renoncer aux textures ultra synthétiques et très siliconées qu’on a prises pour de la modernité. Si une crème se transforme en poudre au contact de votre peau, si votre soin capillaire passe de l’huile à l’effet poudré sec : méfiez-vous ! Vérifiez également les ingrédients cachés derrière les produits de comblement de rides, les flouteurs d’imperfections et les réducteurs de pores qui agissent de manière mécanique ! Ils sont en général gavés de silicones. Pour les reconnaître et savoir s’il y en a beaucoup dans la formule, regardez dans la liste INCI à quel moment apparaissent les ingrédients qui se terminent en « iloxane, one, thicone, thiconol » : s’ils arrivent au tout début de la formule, ça veut dire qu’il y en a une grande quantité vu que les INCI sont rangés par ordre décroissant. S’il y en a un peu (je pense notamment à certains produits capillaires pour les cheveux bouclés), pourquoi pas. Mais si ces matières sont inscrites dès le début de la formule, fuyez : les silicones ne sont pas biodégradables et on les soupçonne de boucher les pores de la peau. Leur effet sur les cheveux à moyen terme n’est pas génial non plus. Il faut aussi qu’on éduque son odorat et son sens du toucher à des sensations différentes de celles que l’on pensait être bonnes pour nous. Pour moi, le linge propre, ça devait sentir l’adoucissant et la lessive Ariel. Je n’en utilise plus. J’apprends à m’habituer à plus de neutralité, à moins d’effets olfactifs. Ca bouscule un peu mais on survit 🙂 On est très conditionné et on ne s’en aperçoit même plus. Décloisonnons nos sensations et abandonnons les croyances qui ne sont que des conditionnements : je n’ai pas dit que ce serait facile !!!

Aujourd’hui, quand j’achète un produit pour m’alimenter, je me demande toujours quelles sont les valeurs politiques de la marque. Vu que les élus censés nous protéger ne le font pas et qu’on continue à autoriser des géants de la pollution à faire comme ils l’entendent, il me semble capital de ne pas leur donner raison et de refuser d’acheter leurs produits. Des listes de marques qui soutiennent Bayer/Monsanto existent pour l’alimentation. Il y en a aussi qui concernent l’univers de la beauté et de l’hygiène. Ce sont souvent les mêmes qui font du green washing en nous vantant le dernier « super aliment » à la mode dans leur gel douche ou en reversant une toute petite partie de leurs bénéfices à une ONG dont ils n’appliquent aucune valeur dans leurs formules. L’engagement politique, c’est aussi soutenir l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. Pas seulement en faisant une pub avec une jolie fille qui déclare la guerre au sexisme, un rouge à lèvres à la main. Quid de l’image des femmes et des hommes véhiculée par la marque à travers ses campagnes ou ses prises de parole sur les réseaux sociaux : fait-elle la promotion de la diversité ? Est-ce que la marque a bien saisi qu’elle ne peut plus continuer à s’adresser uniquement aux femmes blanches de moins de trente ans ? Est-ce que la peau, les cheveux, la cellulite et le corps tout entier sont outrageusement retouchés ? Les marques ne peuvent pas être sur tous les fronts du coup, elles choisissent leurs sujets. Certaines sont concentrées sur la défense des droits LGBTIQ, d’autres sur les droits des femmes, l’aide aux migrants, la lutte contre le racisme, la lutte contre le sida, soutien aux personnes souffrant de handicaps comme l’autisme ou encore la cécité, la recherche contre le cancer, le reforestation… Depuis l’élection de Trump aux États-Unis, on a vu de nombreuses entreprises se positionner. J’en ai même fait un gros dossier beauté pour M le magazine du Monde en avril 2017. Aujourd’hui, le moindre achat est devenu un acte politique. On peut regretter que le bulletin de vote ne suffise plus mais c’est une réalité. Donc, la question est : quel monde suis-je en train de créer en achetant tel ou tel produit ?

La solution : Il y a des marques qui sont engagées à mettre de la conscience politique dans ce qu’elles font. A commencer par ne pas aliéner les femmes en leur imposant des modèles qui ne correspondent pas à leur réalité. On voit enfin, sur le digital, des pores de peau non retouchés, des beautés atypiques, des noires, des asiatiques, des personnes à mobilité réduite… Ca manque de représentation de femmes plus âgées pour être vraiment inclusif. Mais regardez comme ça bouge. Observez comme la représentation du corps évolue chez les marques de mode indépendantes et dans le sportswear versus le monde ancien du prêt-à-porter de luxe qui n’a rien compris au changement de paradigme qui se déroule actuellement. Quant à l’engagement caritatif des marques, on sait bien que les dons participent à leur communication et à leur image (ainsi qu’à leur fiscalité) et qu’ils ne sont pas toujours en cohérence avec la formulation des produits. Mais il y a quand même des démarches vertueuses qui font du bien. Les réseaux sociaux nous permettent d’engager une discussion directe avec les marques. N’hésitons plus à leur poser des questions sur leurs engagements. Quant aux marques restées coincées dans le vieux monde, si vous sentez qu’elles nous séparent les un.e.s des autres, ou qu’elles établissent une hiérarchie entre les êtres humains selon leur couleur de peau, leur âge, leur taille, leur genre ou leur préférence sexuelle, un seul mot d’ordre : boycott !

Aïe, aïe, aïe, on touche ici à la moelle épinière de nos inquiétudes. Si je résume grossièrement, il y a deux grandes peurs : le cancer et les perturbations hormonales. On est tous touché de près ou de loin par ces sujets. Je ne compte plus le nombre de couples qui galèrent ou ont galéré pour concevoir un enfant autour de moi. Je suis effarée par le nombre exponentiel de petites filles réglées à seulement 9 ou 10 ans, un âge qui ne correspond absolument pas à la maturité nécessaire pour accueillir de tels changements corporels. Quant au cancer, ce n’est plus une exception, c’est carrément un tsunami. Les facteurs qui attaquent notre santé sont si nombreux qu’il est bien difficile de savoir qui porte la plus grande responsabilité. Bon, en tant que yogi, j’ai tendance à penser que le problème ne vient jamais de l’extérieur mais qu’il faut s’interroger sur la réalité qu’on se crée à tous les niveaux… Y compris collectif. Quelle réalité créons-nous collectivement avec nos comportements et nos achats individuels ? Aïe, aïe, aïe, c’est beaucoup plus simple de penser que c’est la faute des méchants pollueurs plutôt que de prendre nos responsabilités individuelles. Là encore, je n’attends plus rien des gouvernements (en France, comme ailleurs) qui ne cessent de nous démontrer que l’intérêt général en terme de santé n’est malheureusement pas leur objectif premier. En même temps, on a les hommes (et les femmes peu nombreuses) politiques qu’on mérite donc ne nous plaignons pas : c’est nous qui les avons élus ou laissés élire. Les molécules qui attaquent notre santé sont partout : dans l’air que l’on respire, dans l’eau que nous buvons, dans certains produits ménagers, dans les matériaux qui composent le mobilier, dans les choix alimentaires que nous faisons (sucre, excès de protéines animales, pesticides), dans certaines peintures et autres solvants qu’on absorbe pendant les travaux, dans certains textiles, dans les ondes émises par nos chers téléphones et autres wifi box, dans les produits d’hygiène et de beauté… mais aussi à l’intérieur de nous-mêmes : nous mettons notre propre santé en jeu lorsque nous cultivons la culpabilité, la colère, la honte, le stress, la peur, l’angoisse, la dépression. Comme c’est multi-factoriel, personne ne veut prendre ses responsabilités et chaque industrie renvoie la faute vers un tiers. « C’est pas nous, c’est les avions dans le ciel ! ». D’ailleurs, c’est un argument décliné à l’échelle individuelle: “Foutu pour foutu, je vais pas arrêter d’utiliser ce produit qui pollue mon organisme…le pire pour la santé, c’est quand même pas les cosmétiques!” Après avoir passé plus de quinze ans à rencontrer des chercheurs dans de grands groupes cosmétiques ainsi que des créateurs de marques bio et naturelles, voici les deux visions qui s’opposent. D’un côté, les premiers avancent que la toxicité des ingrédients pointés du doigt n’est pas prouvée au dosage infinitésimal qu’ils en font dans leurs formules et au vu de l’utilisation du produit (application topique sur une surface limitée du corps versus une ingestion par voie orale). J’en ai interviewé plein et des passionnants. Ils choisissent les matières premières en répondant à cette question : « Quel est l’ingrédient qui va permettre à ma formule d’être stable, bien tolérée par toutes les peaux, sensorielle et efficace ? ». Dès qu’on leur oppose une étude alarmante sur une molécule Y, ils ont systématiquement trois études qui démontrent le contraire. C’est sincèrement très difficile d’y voir clair. En plus de répondre à la question stabilité/tolérance/efficacité/texture, certaines marques issues de ces grands groupes ajoutent également une dimension écologique (si, si !) à leur équation, poussées par la demande des consommateurs d’acheter des produits qui font sens. De l’autre, les marques bio ou naturelles (toutes ne sont pas petites et indépendantes, il y en a de plus en plus qui font aussi partie de très grands groupes cosmétiques qui sont taxés de méchanceté) alertent les utilisateurs en dénonçant des ingrédients potentiellement dangereux pour la santé, en affichant les fameux « sans » ou « no » sur leurs packagings et en répétant que même si les perturbateurs endocriniens ne sont pas hautement dosés dans les cosmétiques, on y est si fréquemment confronté que l’accumulation finit par poser un vrai problème de santé. Elles sont aujourd’hui relayées par tout un tas d’applications qui traquent les ingrédients cancérigènes ou les perturbateurs endocriniens. Cependant, ces applis n’ont pas accès au dosage utilisé par la marque et je trouve qu’elles manquent de précision car tout est blanc ou noir (en l’occurrence vert ou rouge) alors qu’il y a plein de nuances de gris entre les deux. En outre, elles ne sont pas toujours d’accord entre elles car leurs critères pour distribuer des bons points diffèrent. Prenez par exemple une marque naturelle qui utilise des ingrédients issus de champs pulvérisés au Round Up. Est-ce qu’elle est meilleure pour votre santé qu’un produit qui contient une quantité minimale d’un conservateur blacklisté par l’opinion publique ? Eh ben vous savez quoi ? Je n’ai pas la réponse ! Je sais juste que les perturbateurs endocriniens ne sont pas uniquement synthétiques. Il existe plein de plantes qui ont un effet hormone like. Dans le bio, ce n’est pas plus simple ! D’abord pour qu’un produit soit bio, il faut qu’il ait un minimum de 10% d’ingrédients bio sur la formule toute entière. Il y a des marques qui ne font pas plus que le strict minimum et qui, en plus, importent leurs ingrédients bio de pays qui ne respectent pas le même cahier des charges que nous. Résultat : le label bio ne signifie pas forcément « bon pour la santé ». Le label « vegan » qui pullule actuellement dans la cosmétique non plus ! Il signifie juste qu’il n’y a pas d’ingrédients d’origine animale dans un produit (parfum ou autre). C’était déjà le cas pour la plupart des produits de beauté (et 99% des parfums) donc, c’est un argument marketing qui ne tient pas vraiment la route, un peu comme lorsqu’on écrit sur une plaquette de chocolat qu’elle ne contient pas de gluten. Il y a de tout dans la beauté. Le pire comme le meilleur et il faut faire le tri. Certaines marques de pharmacies que j’ai interrogées sur le sujet m’ont racontée qu’elles ont tenté plusieurs fois de remplacer les ingrédients blacklistés par les consommateurs par des matières premières validées par les lanceurs d’alerte. Outre les problèmes de ressources quand on produit à grande échelle, elles ont rencontré un autre obstacle. En analysant les lots reçus, elles se sont aperçues qu’ils contenaient plein de polluants et ont décidé de les évincer. Malgré la traçabilité garantie par les fournisseurs et les labels étiquetés sur les barils, il y a des tricheurs qui se moquent pas mal de notre santé. Ca arrive très souvent dans la parfumerie. Je ne sais pas combien de société de parfums qui achètent des matières premières un peu partout dans le monde m’ont raconté le même genre d’histoire…

La solution : Toutes les marques de cosmétiques ne sont pas pourries et certaines sont très concernées par ces questions de santé. Primo, je pense qu’il faut consommer moins de produits de beauté. On réduit ainsi nettement les risques. Toute cette vague de conseils issus d’Asie et en particulier de Corée qui consiste à dire qu’il faudrait appliquer 9 produits le matin sur sa tronche n’a aucun sens. En plus, j’y suis allée en Corée :je peux vous dire que leur acharnement à mettre une tonne de produits sur la peau ne donne pas les meilleurs résultats in situ ! Arrêtons d’acheter des produits quand nous avons déjà tout ce qu’il nous faut. Réduisons les rituels au strict minimum. Ca va à l’encontre de tout ce que j’ai fait en presse écrite et sur ce blog pendant des années, j’en conviens. Je m’autorise aujourd’hui à changer. Je n’avais pas conscience que je vous poussais à consommer des produits dont vous n’aviez pas besoin. Ça fait partie de mon chemin, c’est ainsi, je ne peux pas le renier. Ni la culpabilité ni la honte ne vont m’aider à changer plus vite ou à réécrire mon histoire. J’avance progressivement et je fais comme je peux. Je suis encore attachée à plein de rituels, mais ils ont déjà beaucoup diminué. Je progresse un peu plus chaque jour. Je ne me juge pas, je fais de mon mieux aujourd’hui et maintenant. Ensuite, je crois qu’il faut procéder selon nos priorités respectives. C’est facile d’utiliser uniquement de l’huile végétale quand on a une jolie peau sans problème particulier. C’est plus compliqué quand on a une peau réactive, sèche, grasse, rouge, atopique, acnéique… Personnellement, j’arbitre selon ce qui me semble le plus important. Exemple : la composition des produits qui protègent du soleil est assez dégueulasse pour la peau, la santé et l’environnement. Mais le rayonnement UV représentant un danger reconnu (et un facteur de vieillissement prématuré), je choisis la crème solaire que je considère la plus efficace pour me protéger le visage, même si elle est pleine de « cochonneries ». Et je n’en mets pas tous les jours à Paris ! Je n’en applique que lorsque je suis vraiment exposée au soleil, en rando ou en bateau… Même l’été, il m’arrive de préférer ma casquette et de l’ombre à gogo pour éviter de me remettre de l’écran solaire. Je choisis des crèmes qui « tiennent » bien pour ne pas avoir à en remettre non-stop. En établissant nos priorités, on s’aperçoit qu’on fait déjà bouger les lignes. Une lectrice m’avait fait cette suggestion en commentaire à la suite d’un post de blog: puisque la peau de son visage réagit à la plupart des marques naturelles qu’elle aimerait adopter, elle reste fidèle à un minimum de soins pas vraiment « clean » mais qu’elle tolère bien. En revanche, la peau de son corps n’a pas de résistance particulière, elle utilise donc exclusivement des formules bio pour se laver sous la douche. Si vous avez un doute dans les INCI, vous pouvez appliquer la même règle que celle évoquée dans la partie sur l’innocuité : observez l’ordre d’apparition du produit dit dangereux. S’il est au début de la liste, passez votre chemin. S’il est à la fin, c’est pas génial mais c’est « moins pire ». Punaise, on va finir avec une huile végétale à tout faire et un pain de savon qui servira à nettoyer le corps, le visage, les dents et les cheveux. Je le vois venir GROS comme une maison. Et peut-être qu’on sera tous beaucoup plus libre et heureux…

Dans cette partie, je ne compte pas vous parler du packaging et des déchets mais uniquement de l’impact de la formule elle-même sur l’environnement. Vous êtes-vous déjà demandé où finissaient les shampooings, les gels douches, les bains moussants, les après-shampooings, les mousses démaquillantes et tous les autres produits rincés que vous utilisez ? Saviez-vous par exemple que des groupes cosmétiques ont récemment pris la décision d’arrêter d’utiliser des billes non biodégradables dans leurs gommages car on les retrouve tapissant les océans ! Rayon produits solaires, les constats sont terribles : aucun filtre, même minéral, n’est biodégradable. Pire, les filtres hydrosolubles avec lesquels on recouvre sa peau avant de se baigner, ne sont pas identifiables par les animaux marins qui les mangent et se rendent malades. Il y a aujourd’hui des barrières de corail qui meurent à cause de nos crèmes solaires. C’est déprimant. Lorsqu’on nettoie sa peau le soir et qu’on la rince, on laisse partir dans l’eau les pigments des fonds de teint et les silicones éventuels qui les composent. En même temps, l’alternative coton et lait démaquillant/eau micellaire n’est pas meilleur puisqu’elle produit plus de déchets (et elle n’est pas meilleure pour la peau non plus puisqu’elle a besoin d’un nettoyage quotidien scrupuleux, surtout quand on vit dans un environnement pollué).

La solution : Déjà en prendre conscience ! Pendant des années, je ne me suis posée aucune question en mettant une tonne de bain moussant dans ma baignoire. Je suis certaine que des applications/services sophistiqués et intelligents vont naitre pour nous permettre de faire des choix judicieux. Soyons vigilants concernant les produits rincés. Méfiez-vous des shampooings et des gels douches qui moussent abondamment : c’est inutile, décapant pour votre épiderme et évidemment pour l’environnement aussi. Il y a des super marques qui font des produits qui sont à la fois beaux, sensoriels et sans impact néfaste pour l’environnement. Je vais m’atteler à dénicher ces produits et à vous en parler dans mes weeklists ou sur Instagram. Pas pour vous pousser à consommer plus mais pour vous donner envie de changer de comportement. Le sujet de l’impact environnemental est la priorité de plusieurs grands groupes. Il va devenir une question majeure, c’est certain.

Vous pensiez que les tests sur les animaux dataient du moyen âge (enfin du siècle dernier) et que toutes les marques responsables les avaient exclus de leurs pratiques? Mauvaise nouvelle: si une marque fabriquant ses formules à l’extérieur du territoire chinois décide de les importer en Chine (hors Hong Kong qui n’est pas soumise à la même législation) elle est obligée de faire tester ses formules sur des animaux par des laboratoires chinois agréés ! Si vous voulez comprendre comment ça fonctionne, j’ai trouvé une infographie hyper simple en anglais sur ce site. Je vous rassure: les marques de beauté qui sont distribuées en Chine et qui doivent se soumettre à ces tests ne le font pas de gaité de coeur et se battent depuis quelques années pour faire changer ces règles monstrueuses. N’empêche que pour le moment, c’est comme ça. Donc dites-vous bien que tous les labels cosmétiques, célèbres ou non, qui vendent leurs parfums, skincare, make-up etc… en Chine acceptent les tests sur les animaux. Une exception cependant: les marques qui vendent uniquement en Chine sur Internet n’ont pas à se soumettre à ces tests. Je profite de ce paragraphe pour aborder un autre point: les matières animales. En parfum, on a éliminé toutes les matières animales qui nécessitent qu’on tue ou qu’on fasse souffrir les animaux. Cependant, il y a des matières animales qui ne font absolument pas souffrir les animaux comme l’ambre gris: il s’agit d’une concrétion de cachalot. Le mammifère marin vomit dans la mer après avoir trop mangé, la matière flotte pendant des lustres, finit par sécher et ressemble à une pierre grise qu’on ramasse encore sur certaines plages en Asie. Ca a l’air immonde comme ça mais dans un parfum, c’est incroyablement beau. C’est très rare et ça coûte une fortune donc aucune chance d’en trouver dans un parfum bon marché. Mais les étiquettes “vegan” qu’on voit débarquer sur les flacons de parfum vont probablement pousser les marques qui utilisaient encore l’ambre gris à l’évincer et c’est dommage. Autre point: l’utilisation de matières animales comme la lanoline (la graisse qui est récoltée sur la laine des moutons) qui est d’une efficacité redoutable pour soigner les gerçures et sur le bout des seins quand on allaite ainsi que les produits de la ruche (gelée royale, miel, propolis). Les végétaliens purs et durs excluent l’utilisation de tous ces produits, par voie orale et topique. Je ne suis pas aussi stricte si j’ai la garantie que les animaux n’ont pas souffert au passage. Mais c’est difficile d’avoir une réponse claire, surtout en ce qui concerne les élevages de moutons…

La solution: Les tests sur les animaux pour la création de produits cosmétiques sont absolument révoltants. Impossible de dresser la liste des marques concernées: à peu près toutes celles que vous croisez en parfumerie le sont. Vous pouvez les boycotter: ça va faire un grand ménage dans votre salle de bain 🙂 Quant à l’utilisation de produits d’origine animale, apprenons à faire le tri et surtout continuons à poser nos questions aux marques sur les réseaux sociaux: d’où vient cette matière? est-elle prélevée avec éthique? 

C’est bien beau d’intégrer des ingrédients naturels ou bio dans une formule mais sait-on si la marque agit dans le respect du développement durable ? Quand on voit les ravages causées par l’utilisation de l’huile de palme, on est en droit de se questionner. Il y a aussi, comme en alimentation, tous ces ingrédients à la mode (avocat, quinoa…) dont la culture à outrance finit par appauvrir les sols et les populations locales. Je m’interroge par exemple en cosmétique sur l’huile de coco qui est déclinée sous toutes ses formes alors que l’on ne l’utilisait quasiment pas il y a encore dix ans.

La solution : Encore une fois, questionner les marques sur les réseaux sociaux (elles répondent plus vite quand elles sont interpellées publiquement) sur l’origine des ingrédients utilisés et le respect du développement durable. Dans le domaine de la parfumerie, il y a des marques de luxe qui sont très impliquées sur ces enjeux. Dans le skincare aussi. Ce sont des données qui évoluent d’une saison à l’autre, d’autant que le changement climatique accéléré exige que tout le monde reste en mouvement constant : ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera peut-être pas demain. Un ouragan, un tremblement de terre, une canicule et tout un circuit peut disparaître du jour au lendemain. D’où la nécessité pour les marques de ne jamais croire qu’elles ont trouvé LA solution parfaite et de rester bien informées sur ces sujets

Cette partie rejoint celle sur l’engagement politique. Quelles sont les valeurs de la marque à l’intérieur de l’entreprise ? On peut respecter l’environnement mais agir comme des salauds à l’intérieur d’une société. La parité est-elle respectée au sein de l’entreprise ? Les postes à responsabilité sont-ils autant confiés à des femmes qu’à des hommes ? Comment les employées sont-elles traitées pendant leur congé maternité ? Leur carrière est-elle ralentie lorsqu’elles reprennent leur travail ? Quid des plus de cinquante ans ? La diversité est-elle bien respectée dans l’entreprise ? Le travail des fermiers en France ou à l’autre bout du monde est-il correctement rémunéré? Les employé.e.s dans les usines de fabrication sont-ils/elles respectées? Pour le consommateur, c’est assez difficile de savoir ce qui se passe en interne. Mais dans l’ère dans laquelle on est entré, toutes les vérités finissent par devenir visibles. Cela prend du temps mais c’est en marche et ça s’accélère un peu plus chaque jour. Le vieux monde des secrets bien gardés est caduque. Respecter le vivant sous toutes ses formes, c’est respecter la santé de son propre corps, celle des consommateurs, celle de la planète mais aussi celle de son équipe. On devrait pénaliser les entreprises dont les employés multiplient les arrêts maladie ou les burn out. Encore une fois, quand on achète, on doit toujours se poser la même question : à qui suis-je en train de donner raison ? Une de mes amies qui a une marque de beauté me disait que sa plus grande joie était de faire grandir les membres de son équipe. Elle a bien évidemment compris que dès qu’on fait quelque chose qui donne du sens à notre existence, on ressent tellement de joie qu’on n’attend plus désespérément le vendredi en démarrant la semaine. Le travail devient une source d’épanouissement. Ce n’est pas délirant comme idée, c’est même très simple. Ces dernières années, j’ai entendu beaucoup d’attachées de presse de la beauté me raconter le cauchemar qu’elles vivent au quotidien dans leurs boites respectives  : c’est monstrueux. Derrière le vernis impeccable des flacons de luxe, il y a un nombre incalculable d’employés en souffrance qui ont la sensation d’être inutiles ou soumis à un système qui n’a plus aucun sens.

La solution : Difficile de savoir précisément comment les employés sont traités en interne sans avoir fait partie de la boite. Mais on apprend pas mal de choses en écoutant les dirigeants ou les fondateurs s’exprimer. Les valeurs d’une marque et son authenticité quand elle prend la parole permettent de récolter également de précieuses informations. Faisons marcher notre intuition.

Je ne peux plus supporter la surenchère d’emballage des marques de beauté de luxe: des boîtes logées dans des boîtes elles-mêmes logées dans des boîtes. Ca me donne envie de hurler. J’ai l’impression qu’on met une forêt dans un cercueil à chaque fois qu’on fait ça. Le sujet du packaging est si vaste que je ne vais pas pouvoir être exhaustive. Il n’y a pas de solution parfaite pour le moment. Le verre est certes recyclable mais son recyclage dépense énormément d’énergie et sa fabrication des ressources non infinies. Le verre est idéal lorsque les packagings sont réutilisables (dans le domaine du parfum, il y a plein d’initiatives de ce type depuis les années 1990), même s’il n’est pas pratique quand on voyage. A quand les consignes de verre dans le domaine du skincare, du corps, des cheveux et de l’hygiène ? Rayon plastique, j’ai déjà abordé ce sujet avec cette weeklist, je vous laisse aller lire le sujet si vous voulez creuser. Il y a aussi de nouveaux matériaux biodégradables qui ressemblent à du plastique mais qui sont issus de la canne à sucre. Je vous en reparlerai quand je serai un peu plus au point sur ces sujets car les avis sont contrastés, en particulier sur leur devenir après utilisation et leur recyclage si la biodégradation naturelle est trop lente. Je vais interviewer des pros sur ces thèmes pour ne pas vous dire de bêtise.

La solution : Pour atteindre l’objectif « zéro déchet » il va falloir 1) consommer moins 2) aller vers des produits solides non emballés, des packagings biodégradables ou réutilisables à vie. Blocs de shampooings solides sans emballage, pains de savon à la coupe, baumes (de parfum, de soin pour la peau ou les lèvres) emballés comme des sticks mais en carton. Ou bien imaginer des packagings réutilisables à vie qu’on viendrait remplir en boutique une fois le produit terminé. Peut-être que les compléments alimentaires, lorsqu’ils sont sains et adaptés (et, pourquoi pas, emballés en vrac dans des boîtes réutilisables) pourront nous permettre de soigner la peau, les cheveux, les ongles sans que nous ayons besoin d’acheter des produits topiques? Parce que dans ce cas, il n’y a pas de déchet: tout passe à l’intérieur du corps! En attendant de trouver le produit qui cocherait toutes les cases du zéro déchet, privilégions, quand nous achetons un flacon en plastique 1) un très grand format 2) un plastique clair ou transparent qui sera plus facilement recyclé (le plastique de couleur est malheureusement peu recyclé pour des raisons économiques: les sociétés de recyclage privilégient le transparent qu’elles revendent mieux) 3) du plastique recyclé issu des océans ou du plastique végétal. Et puis, évitons la surenchère de packaging ! Cette année, par exemple, j’ai décidé de ne pas vous parler des calendriers de l’avent. On a très bien vécu sans pendant des décennies. A présent, toutes les marques en font, y compris des sociétés connues pour leur engagement écologique. Ca n’est pas cohérent. Tous ces coffrets gigantesques remplis de mini flacons qui atterrissent à la poubelle une fois ouverts, ça n’est plus possible, non ?

On pourrait croire que c’est un sujet mineur mais c’est le nerf de la guerre : combien de fois avons-nous renoncé à acheter un produit sain et opté pour un soin moins vertueux uniquement parce qu’on le trouvait laid? On n’a pas tous les mêmes goûts donc évidemment ce point est tout à fait subjectif. Les marques qui ont une conscience écologique ont longtemps été « moche-dingues » mais depuis quelques années, ça bouge et on voit émerger des chartes graphiques désirables du côté du bio et du naturel. Les marques les plus responsables éliminent les boîtes en carton autour de leurs produits, pour réduire les déchets, du coup, elles ont énormément de mentions légales obligatoires à faire figurer sur leurs produits. Ce n’est pas simple de réussir à faire quelque chose de beau quand on a un annuaire à mettre sur le pack.

La solution : Ce n’est pas un problème majeur. J’ai plein de produits « moches » dans ma salle de bain qui sont efficaces. N’empêche que j’aime mieux quand c’est beau 🙂

Utiliser des ingrédients bio ou naturels de qualité, un pack en verre, payer des tests d’innocuité (certains sont obligatoires mais il y a des marques qui vont beaucoup plus loin), privilégier l’économie locale, tout ceci a un coût qui peut paraître élevé une fois le produit fini. Attention cependant à un piège: ce n’est pas parce qu’un produit est cher qu’il est bon pour la santé, l’environnement, efficace ou juste de qualité. Il y a un énorme “foutage de gueule” (pardon, mais je ne trouve pas d’autres expressions) chez de nombreux acteurs du luxe qui fixent leurs prix en s’alignant sur la concurrence avant même d’avoir élaboré leur formule.

La solution : Les pure players (ceux qui vendent uniquement sur leur propre site Internet) sont censés marger moins car ils n’ont pas à payer un distributeur au passage. Mais tous ne respectent pas cette règle. Moins marger est une clef importante pour l’avenir : les marques doivent accepter qu’elles vont gagner un peu moins sur chaque produit mais que c’est le seul moyen d’instaurer une économie plus juste, un rapport de confiance avec le consommateur et donc un succès à long terme. Du côté du consommateur, on doit s’éduquer comme dans l’alimentation et la mode à accepter l’idée d’un prix juste. Un prix dérisoire a toujours un coût sur notre santé et sur l’environnement… Evidemment, dans ce domaine, les très grandes marques qui produisent en volume sont avantagées par rapport aux toutes petites: elles peuvent mieux négocier les prix avec leurs fournisseurs, qu’il s’agisse du pack ou des matières premières. 

J’ai trouvé la marque idéale. Elle s’appelle Décroissance…

La marque parfaite qui remplirait tous les quartiers de ce cercle vertueux n’existe pas encore. Enfin si : elle s’appelle DÉCROISSANCE. Réduire sa routine, faire de la place, s’habituer à moins, s’aimer tel que l’on est, dans notre plus pure vérité: finalement la solution est simple et joyeuse. J’ai encore du chemin mais petit à petit, je me libère et c’est doux. Je ne juge pas du tout celles qui ne font pas les mêmes choix que moi (comment le pourrais-je alors que j’ai participé à l’obsession collective pour les produits de beauté ?). Je n’ai pas envie de me passer de tout et j’ai toujours du plaisir à utiliser ponctuellement un produit de maquillage qui reste à mon sens un ornement millénaire. J’aime me parfumer, me crémer le matin et me nettoyer le visage le soir. Je me questionne juste sur le sens de mon parcours professionnel : j’ai aimanté à moi l’univers de la beauté. Il n’est pas entré dans ma vie par hasard comme j’aime le raconter. C’est la beauté qui m’a menée au bien-être. Je n’aurais pas rencontré Gwenn Libouban si l’attachée de presse de la marque brésilienne Natura ne m’avait pas organisé un rendez-vous avec elle. Je n’aurais pas connu Gregor Schultze si Christophe Robin ne me l’avait pas recommandé quand j’étais encore à Vogue… Mais mon obsession pour les produits de beauté vient aussi nourrir deux gros karmas chez moi : la peur du changement (donc en sous texte, la peur du corps qui change, de la peau qui change et de la vieillesse). Et l’idée que je devrais être parfaite pour avoir le droit d’exister. Corriger ses défauts, cacher ses cernes comme ses ombres, planquer ses boutons et ses aspérités, ça n’est pas trop dans l’esprit du Sat Nam, le mantra qu’on chante à la fin d’une pratique de kundalini yoga et qui signifie véritable identité. Depuis que je suis consciente de ça (c’est très récent) je lâche beaucoup de pression. C’est jouissif.

Mais du coup, que choisir quand on a besoin d’un produit de beauté ?

Sélectionnez les cases du cercle les plus importantes pour vous. Chez moi, l’innocuité prévaut (marre des réactions cutanées mais je compte m’offrir un bilan de fond avec une naturopathe pour comprendre cette sensibilité cutanée), puis le respect de l’écologie dans son ensemble, ce qui est nouveau. Je suis prête à investir plus d’argent dans un produit de qualité. Je suis prête à renoncer à une belle identité visuelle (il y a plein de produits moches et efficaces dans ma salle de bain). Je veux bien accepter certains ingrédients potentiellement dangereux pour ma santé s’ils sont très faiblement dosés et si je comprends quel intérêt ils présentent par rapport à un autre ingrédient. Ma peau au niveau du corps étant moins sensible que celle du visage, je suis prête à faire plus d’efforts écologiques sur les soins rinçables. Quant aux produits qui ne sont ni vertueux pour l’environnement, ni pour ma santé, j’essaie de limiter leur usage au strict minimum. C’est une très grosse transformation pour moi. Un énorme engagement parce que je pars de très loin… Publier ce texte m’a demandé du courage, je ressens une grande émotion en le terminant car c’est comme une page qui se tourne. Et un nouveau chapitre qui s’ouvre. Let’s go!