Retrouver le sommeil

Retrouver le sommeil

Retrouver le sommeil

Il y a quelques semaines, j’ai proposé, sur Instagram, une séance de méditation dédiée au sommeil car vous avez été plusieurs centaines à m’écrire au sujet de vos problèmes d’insomnie depuis le début du confinement. J’avais promis de détailler certains points abordés dans un post de blog. Le voici ! A vous de choisir quelle astuce vous pourriez adopter pour mieux dormir la nuit…

Lorsque j’étais journaliste, j’étais si stressée que je dormais rarement plus de quatre heures chaque nuit. Une année, alors que j’avais quitté le magazine Vogue et que j’étais à nouveau pigiste (c’est-à-dire journaliste indépendante rémunérée pour chaque article rendu), j’ai passé plusieurs mois à tenir sur des nuits de trois heures. Ma généraliste que j’étais venue voir pour un renouvellement d’ordonnance m’avait alors dit : « Vous avez l’air fatigué, vous dormez bien la nuit ? Attention à ne pas pousser trop loin votre corps quand même. » Je marchais sur un fil. En permanence. Je ne ressentais même plus la fatigue, je m’étais habituée à ce qu’elle fasse partie de ma vie. Souvent mon entourage s’étonnait de me voir réussir à écrire autant d’articles pour plusieurs publications ainsi que des posts de blog tout en honorant un emploi du temps surchargé en rendez-vous. J’ai le souvenir de mes réveils à l’aube où je me mettais à bosser en quête d’une reconnaissance que je n’arrivais pas à m’offrir intérieurement. Tout cela me parait bien loin à présent. La découverte du kundalini yoga m’a permis de retrouver le sommeil réparateur que je n’espérais plus. Le ralentissement de mon activité que j’ai choisi d’enclencher en conscience après la sortie de mon premier livre Pimp My Breakfast en avril 2018 a également beaucoup compté dans l’amélioration de mon sommeil.

Photographie Lili Barbery-Coulon

Désormais, je dors sans me réveiller six à huit heures d’affilée selon les jours. Je ne fais pas partie de ceux qui ont besoin d’une grasse matinée pour être en forme. Je me suis toujours réveillée tôt, y compris lorsque j’étais ado et je n’ai jamais eu besoin de réveil. J’utilise toutefois une alarme lorsque je dois donner un cours le matin mais je me réveille toujours naturellement une à deux minutes avant qu’elle ne sonne. Je n’ai aucun mérite à cela, c’est la manière dont mon métabolisme fonctionne. Néanmoins, les quinze premiers jours du confinement, j’ai remarqué que je me réveillais beaucoup plus tôt que d’habitude alors que je m’endormais tard. Vers 4h, parfois même 3h30 du matin, je me sentais électrisée par un courant énergétique que je ne connais que lorsque je suis en stage intense de yoga. Au cours de ces deux premières semaines, j’ai eu l’impression que ces courtes nuits me servaient à télécharger de nouveaux programmes, comme si mon corps avait compris, avant mon mental, la sensation d’enfermement, la privation de nature et d’amis ainsi que la transmutation nécessaire en cours. Je n’étais pas fatiguée, j’étais excitée comme un enfant le matin de Noël. J’en ai profité pour aller méditer tôt. C’était magique. J’avais l’impression d’être un vase dans lequel ma conscience supérieure faisait couler des messages précis. Une guidance détaillée. Un GPS à l’épreuve du confinement afin de (re)trouver le chemin vers l’infiniment grand en moi.

Cette période de nuits courtes n’a pas duré et tout s’est remis rapidement en place. Je me lève toujours tôt (enfin pas aussi tôt que 4h !) mais je m’endors à nouveau à mes heures habituelles (appelez moi Mamie Lili). Les soirs où je dors moins bien n’ont aucun mystère : soit j’ai abusé de l’écran de mon téléphone et je n’ai pas coupé suffisamment tôt avant de me mettre au lit. Soit j’ai trop mangé à l’heure du dîner.

Photographie Lili Barbery-Coulon il y a bientôt 13 ans

Pourquoi a-t-on autant de mal à dormir en ce moment ?

Rappelons que nous n’avons jamais vécu une situation similaire. Cela ne signifie pas que cela soit l’épisode planétaire le plus difficile de l’histoire de l’humanité, loin de là. Mais reconnaissons le caractère inédit de ce que nous traversons mondialement. Même ceux qui sont confinés dans des conditions de rêve sont privés de leurs habitudes, de leurs proches et de leur quotidien. Pour un grand nombre d’entre nous, et en particulier ceux qui vivent dans de petits espaces sans jardin ni terrasse, le confinement est une véritable épreuve. Tous les problèmes qui existaient avant la crise sanitaire sont encore plus visibles (je pense notamment à ceux qui souffrent de solitude, de misère sociale ou qui subissent des maltraitances… je rappelle à ce sujet que les femmes victimes de violences peuvent contacter le 3919 ou consulter le site comment on s’aime et que, s’il y a parmi vous un enfant ou un adolescent qui est soumis à la violence d’un adulte ou même d’un membre de sa fratrie, vous pouvez appeler le 119 qui vous viendra en aide) et les angoisses qui étaient jusqu’alors « tolérées » sont désormais démultipliées. Si l’on n’en prend pas conscience dans la journée, la nuit va se charger de nous le rappeler. Les peurs, la tristesse ou les colères retenues sont exacerbées au moment du coucher et bloquent l’accès à un sommeil serein. La situation ne risque pas de s’arranger avec la surconsommation d’informations sur la crise en cours, surtout avant d’aller au lit. Mais il n’y a pas que l’angoisse qui empêche d’avoir une nuit réparatrice… sans vivre une situation dramatique ni même trainer sur des chaines d’infos, on peut rencontrer des problèmes de sommeil pour des raisons liées au confinement lui-même.

Lumière et rythme circadien

Il y a au moins quinze ans, j’ai écrit plusieurs articles sur les moyens de lutter contre le décalage horaire. J’avais alors interviewé des experts en chronobiologie et en sécrétion hormonale. Notre appétit comme notre sommeil ainsi que la plupart de nos fonctions vitales sont régulés par une horloge interne qui se déploie sur 24 heures. On l’appelle le rythme circadien. Ce rythme est lié à une hormone – la mélatonine – qui est sécrétée en fin de journée, lorsque tout va bien. C’est la glande hypothalamus qui se charge de donner l’ordre de la sécréter. Mais imaginez un pays où chaque hypothalamus n’en ferait qu’à sa tête : on aurait tous des cycles de sommeil différents, ce serait ingérable. Comme la nature est parfaite et que son cycle est calé sur le temps de rotation de la terre, l’hypothalamus est directement soumis à des récepteurs qui se trouvent au niveau de nos globes oculaires, sensibles à la quantité de lumière reçue. Quand tout va bien, on reçoit de grandes quantités de lumière lorsqu’on sort pour aller travailler, puis en allant déjeuner ou même en faisant des pauses à l’extérieur du bureau en pleine journée. Le soir, la lumière décline naturellement avec le coucher du soleil, ce qui représente un autre indicateur important pour notre horloge interne (d’où l’intérêt de dormir dans le noir et pas dans une pièce partiellement éclairée). Or, en ce moment, ceux qui n’ont ni jardin ni balcon restent parfois plusieurs jours sans accès direct à la lumière du jour (il y a tellement d’appartements sombres dans les grandes villes !). Une sortie d’une heure par jour est autorisée mais beaucoup limitent leurs allers et venues par peur d’attraper le virus ou de le transmettre, ou pour éviter les ambiances trop lourdes énergétiquement (en ce qui me concerne, c’est l’énergie dans la rue lorsque je vais faire mes courses qui m’est le plus difficile à supporter depuis le début du confinement : les messages du gouvernement diffusés dans les magasins comme dans un film de science-fiction, la peur palpable des individus que l’on croise en chemin, la vie normale et les conversations avec les voisins qui me manquent…). Idéalement, il faudrait se mettre au moins 10 à 15 minutes au soleil une fois dans la journée, quitte à tendre le cou par la fenêtre. Autre facteur perturbateur : le trop plein de lumière bleue le soir. Si la rétine est sensible à la lumière du soleil dans la journée, elle l’est aussi à la lumière des écrans d’ordinateur, de tablette numérique et de smart phones le soir. Or, nous consommons tous beaucoup plus d’écrans qu’habituellement. Ils constituent aujourd’hui notre lien avec l’extérieur. Si vous avez vraiment du mal à dormir correctement la nuit, essayez de limiter l’usage des écrans au moins une heure avant d’aller au lit. Je n’y arrive pas toujours pour être honnête. Et c’est pourquoi je m’impose des coupures franches. Les bénéfices se font immédiatement sentir lorsque je m’autodiscipline. Essayez, vous verrez !

Appétit et sommeil

Le manque de sommeil réparateur a un impact direct sur l’appétit. C’est le serpent qui se mord la queue car dès qu’on change nos habitudes alimentaires, cela va aussi avoir des conséquences sur le sommeil. « Bon ben foutu pour foutu, autant défoncer les derniers œufs de Pâques des gosses et tester la fournée de pain maison avec du beurre salé, au moins, ça nous empêchera de nous ennuyer toute la soirée » : c’est une stratégie alléchante mais il y a peu de chances qu’elle nous conduise à un sommeil serein. L’excès de sucres (alcool inclus) risque de provoquer un endormissement prématuré mais il augmente la probabilité de réveils en pleine nuit. L’excès de gras au moment du diner va également mettre des bâtons dans les roues de notre horloge interne. Idéalement, il faudrait manger une soupe ou un bouillon pour vraiment bien dormir… Je reconnais que ce n’est pas l’option la plus sexy de ce confinement :-). Sans se transformer en moine tibétain, on peut se contenter de dîner en conscience le soir, c’est-à-dire, pas trop vite, à table (et pas sur le canapé), sans écran, en dressant une jolie table avec notre plus jolie vaisselle et en essayant de mettre de la couleur dans son assiette. L’idée n’est pas de se priver mais plutôt de reprendre contact avec les besoins de son corps. La mise en scène va nous aider à rester concentré sur ce que l’on est en train de faire (pleinement présent à l’action de manger), du coup, le corps disposera de plus de moyens pour nous faire passer les messages de satiété que nous avons du mal à entendre.

photographie Julie Ansiau (throwback, je n’ai pas de terrasse)

L’exercice physique et le sommeil

A moins que vous ayez accès à un vaste terrain autour de votre maison, il y a peu de chance que vous marchiez autant que d’habitude. A Paris, en temps normal, je me déplace quasiment uniquement à pied. J’adore marcher et à un bon rythme. Du coup, depuis le début du confinement, je ne bénéficie pas de la dose de mouvement dont j’ai besoin. Il y a aussi tous ces pas que l’on fait lorsqu’on est dans un open space, au bureau, de la machine à café à la photocopieuse… ils n’ont l’air de rien mais ils participent aussi à l’équilibre du corps. La marche active le retour veineux, ce pompage naturel du sang vers les veines. Sans lui, la circulation sanguine est ralentie… Là encore, le corps ne comprend pas ce changement et risque de se manifester pendant la nuit. La réflexologue Gwenn Libouban, qui a écrit le livre L’homme est un arbre qui marche (Editions Marabout) recommande d’utiliser une balle de tennis et de la faire rouler sous les pieds afin d’activer le retour veineux. On peut le faire même en étant assis, en télé travail. On peut aussi se mettre des alarmes sur son téléphone pour se lever régulièrement, au pire, monter et descendre les escaliers de son immeuble, juste pour bouger un peu. Le plus efficace est de pratiquer une activité physique le matin au réveil. Pourquoi le matin ? Toujours dans l’optique d’envoyer un message clair à son horloge interne : je m’agite parce que c’est le matin et que j’ai terminé ma nuit… Essayez de ne pas pratiquer une activité sportive intense dans les trois heures qui précèdent l’endormissement. Pas d’inquiétude si vous avez pris l’habitude de méditer avec moi sur Instagram à 18h. Certes, nous nous agitons et transpirons ensemble parfois mais sur une durée très courte. Même si vous faites la respiration du feu que je propose au cours de mes méditations, on la pratique pendant des durées si courtes qu’elle ne vous privera pas de sommeil la nuit. En revanche, si vous connaissez la méditation Sodarshan Chakra Kriya (il y a une vidéo sur mon compte Instagram dans laquelle j’explique comment la pratiquer) et que vous avez l’idée saugrenue de la pratiquer 31 minutes le soir (ou 1h30 d’affilée comme je l’ai fait lors d’un stage) je vous garantis que vous allez vous en souvenir longtemps : impossible de fermer l’œil de la nuit tellement votre niveau énergétique sera élevé.

Photographie Lili Barbery-Coulon: un bain chaud… « les dents, pipi et au lit » 🙂

Ritualiser le coucher comme on le fait avec les enfants

Les parents qui ont déjà eu à accompagner leurs enfants sur le chemin de nuits paisibles le savent : rien de plus efficace que de ritualiser la fin de journée pour qu’ils se sentent en sécurité la nuit. Le bain ou la douche, le repas, le brossage de dents, l’histoire, la berceuse et au lit (et zéro écran dans l’équation). Même si je n’ai aucun mal à m’endormir, j’adore prendre une douche bien chaude ou un bain le soir car j’ai remarqué que cela avait un effet soporifique sur moi. Une étude publiée dans la revue Sleep Medecine Review en 2019 démontre qu’il ne s’agit pas seulement de mon imagination : réguler la chaleur du corps 60 à 90 minutes avant de se mettre au lit a un impact sur le rythme circadien et donc sur la rapidité d’endormissement. Les soirs où j’ai le temps, j’ajoute un auto-massage du corps en suivant les méridiens énergétiques comme je l’ai appris au cours de mes formations à l’enseignement du yoga. Si vous n’avez aucune idée des mouvements à faire, contentez-vous de masser avec une huile végétale de votre choix (l’huile de sésame alimentaire convient très bien si vous n’avez rien d’autre sous la main. L’huile de coco est moins pratique, je trouve. L’huile d’amande douce est fantastique en revanche. Sinon, il y a des huiles de massage spécifiques : une que j’aime beaucoup chez la marque française Oden, une huile d’amande douce chez Typology, l’huile à la lavande de Susanne Kaufmann ou encore l’huile à la lavande de Weleda) des orteils en remontant vers le haut des cuisses, le ventre dans le sens des aiguilles d’une montre, du bout des doigts des mains en remontant vers les aisselles, massez délicatement le cou, les oreilles, le dos comme vous pouvez. Ne vous massez pas vigoureusement (sauf si vous connaissez parfaitement le massage et que vous savez ce que vous faites), vous ne cherchez pas à réveiller le corps, mais à l’apaiser. Au début du massage, au moment de masser vos pieds, n’hésitez pas à faire deux mouvements recommandés par la réflexologue Gwenn Libouban. Le premier consiste à créer un effet de pompage avec les pouces en pressant le centre de la voute plantaire, pile dans la zone qui correspond au plexus solaire ; ce point relié au diaphragme permet de libérer les émotions retenues. On peut aussi passer ses doigts entre les orteils et remonter de leur racine vers la tête des orteils. C’est une manière de soulager ce qui pèse au niveau mental. Vous pouvez aussi boire une tisane apaisante – la tisane Calme de l’Infuseur est une merveille – (j’assume complètement mon statut de Mamie Lili 🙂 mais attention : si vous buvez trop ou juste avant d’aller vous coucher, vous risquez d’être réveillé par l’envie d’aller aux toilettes en pleine nuit. Un autre truc qui marche très bien en ce qui me concerne est de lire quelques pages une fois installée au lit : le mouvement oculaire de gauche à droite et de droite à gauche me détend et m’endort rapidement.

Photographie Lili Barbery-Coulon. Mon dernier flacon de lavande que je trimballe partout avec moi (enfin en ce moment, il est surtout chez moi hein)

Aromathérapie avant d’aller au lit

Je ne suis pas du tout une experte en aromathérapie, mais au fil des apprentissages au cours de mes formations, des discussions avec mes amies qui maitrisent parfaitement l’utilisation des huiles essentielles, j’ai pris l’habitude d’en avoir toujours avec moi. Il fut une époque où je collectionnais les vernis à ongles. Désormais, mes flacons d’huiles essentielles prennent plus de place dans ma salle de bain que n’importe quelle catégorie de produits. Je ne les utilise jamais sur mon visage car j’ai ma peau sur cette zone réagit aussitôt. En revanche, j’aime les utiliser sur les poignets, certains organes ou directement sur des centres énergétiques comme le sternum, le nombril, le thymus ou le chakra sacré… Lorsque je suis en colère, j’aide mon foie avec une goutte d’huile de citron que je masse à droite sous les côtes flottantes (au niveau du foie donc). Odile Chabrillac qui est naturopathe et qui enseigne cette discipline dans l’école qu’elle a fondée (l’Institut de Naturopathie Humaniste) m’a recommandé de le faire il y a quelques années alors que j’étais très fatiguée et que je travaillais sur des colères archaïques et cela m’a beaucoup aidée. On peut déposer une bouillotte pas trop chaude sur la zone massée (et évidemment bien verrouillée et enveloppée d’un linge : pas de plastique bouillant à même la peau !). On peut aussi aider ses reins qui filtrent les peurs avec une goutte d’épinette noire à masser dans le dos, au niveau des reins (regardez une page d’anatomie sur Google pour bien situer les deux organes). J’ai l’habitude de masser une goutte essentielle de lavande entre mes deux poignets puis d’inspirer et d’expirer profondément la senteur. Elle est très efficace pour se détendre. Dans son livre Seasons, mon amie Caroline Wachsmuth propose même d’en placer une goutte entre les deux sourcils au niveau du troisième œil afin de détendre le système nerveux pour amplifier l’effet apaisant de la méditation. Il existe aussi de nombreuses brumes à oreillers qui compilent lavande et autres huiles essentielles à vaporiser (chez Ren, This Works, L’Occitane…) pour favoriser la détente. Ces produits dédiés ont l’avantage de ne pas tacher le linge et d’être plus équilibrés niveau olfactif qu’une huile essentielle pure. Mais ils sont plus chers et moins faciles à transporter.

Identifier et se libérer des émotions

Difficile de bien dormir lorsqu’on a sous la peau un tissu de peurs et de colères entremêlées. La première étape pour s’en libérer est d’identifier les émotions en présence. C’est ce que nous faisons lorsque nous méditons. L’idée n’est pas de créer un vide artificiel, mais d’observer sans juger ce qui est là. Je reçois souvent des messages d’internautes surpris par l’effet de la méditation qui leur permet de contacter une zone émotionnelle qu’ils ou elles avaient placée sous le tapis sans s’en apercevoir. Nathalie Desanti, qui est coach pour enfants et adolescents (elle tient d’ailleurs un podcast truffé de conseils déculpabilisants pour les parents), me rappelait il y a peu, que le mot émotion vient du latin motio qui signifie mouvement. Les émotions ne nous constituent pas. Si on arrive à les observer c’est bien que l’essence de ce que nous sommes est l’observateur et non l’objet qu’il regarde. Nos émotions ne cessent d’évoluer. Elles bougent comme des nuages dans le ciel. Pourtant, au lieu de les regarder comme des messages, on les juge, on les évalue, on leur donne des notes et on n’est content que lorsque la sensation associée à l’émotion est agréable. Regarder ce qui est en nous à un instant donné n’établit pas une carte d’identité. Une heure plus tard, la tentative d’autoportrait serait alors caduque car l’émotion aura déjà changé. La méditation nous aide à prendre conscience de ce qui est là pour ensuite accepter de le relâcher. La partie qui suit n’est pas la plus aisée car on n’est pas toujours prêt à laisser partir l’histoire qui est associée à l’émotion, surtout si l’on s’est totalement identifié à elle. Le kundalini yoga (et ce n’est évidemment pas la seule technique) permet de laisser émerger ce qui était sous-jacent et de choisir en conscience de relâcher l’expérience. Évidemment, cela demande un travail régulier et je mentirais en vous disant qu’il suffit d’un claquement de doigts pour se libérer de la peur du manque ou d’une colère ancienne. Il existe néanmoins un exercice qui peut être fort utile pendant cette période, une fois que vous aurez identifié l’émotion en présence. Avant de vous coucher, vous avez l’habitude de vous brosser les dents et de vous déshabiller. Intégrez une nouvelle étape à votre routine. Asseyez-vous sur un support, fermez les yeux et prenez un instant, la colonne bien droite, pour inspirer et expirer en conscience. Observez votre souffle. Observez avec quelle partie du corps vous respirez. Observez les tensions corporelles éventuelles. Observez à présent votre état émotionnel. Si des pensées associées remontent du genre « Forcément j’ai mal au ventre après ce que ma sœur m’a dit ! Quand je pense que je l’ai écoutée sans broncher pendant 4 semaines depuis le début du confinement alors que je me contrefous de ses problèmes avec son mari… et là, j’ai le malheur de l’appeler pour lui demander un peu de soutien et elle me répond qu’elle peut pas, parce qu’elle fait de la pâte à sel avec Maxence !!!! »… Si vous revenez dans votre posture d’observateur, vous allez vite vous rendre compte que vous êtes sorti de votre état d’unité avec votre souffle et que vous vous êtes fait attraper par une histoire qui est déjà passée mais que vous réactivez dans votre présent. Alors vous pouvez vous pardonner en déclarant mentalement : « Je me rends compte que je n’observe plus, je reviens dans mon état d’observation et je choisis de déposer cette histoire qui ne me constitue pas. Je choisis de ne pas aller me coucher avec cette histoire que je dépose à présent – vous pouvez visualiser une étagère imaginaire par exemple. Je ne suis pas l’histoire puisque je suis capable de l’observer et de la déposer. En l’observant, je prends de la distance et elle se transforme au contact de mon regard bienveillant. » Cet exercice de l’étagère sur laquelle on dépose tout ce qui pourrait encombrer notre sommeil me rappelle la boîte que le personnage du livre pour enfants La Grosse Colère de Mireille d’Allancé utilise pour ranger sa colère gigantesque. Lorsque l’enfant s’aperçoit qu’il n’est pas ce monstre gigantesque qui casse tout dans sa chambre, mais qu’il s’agit simplement d’une émotion qui l’a dépassé, il peut, en la rangeant, la rendre inoffensive. Quand ma fille était petite, mon mari s’était inspiré de ce livre pour lui créer une boite à émotions. Cela n’a l’air de rien mais c’est un outil puissant qui permet à l’enfant de prendre l’habitude de nommer ses émotions et de s’en détacher. Si l’exercice de l’étagère ne vous parle pas, vous pouvez utiliser un journal pour déposer matin et/ou soir le fil de vos pensées et de vos émotions. Sans chercher à bien écrire ni à être cohérent : l’écriture automatique est très efficace pour se libérer de ce qui nous pèse.

Une respiration facile et efficace pour se détendre

Même si vous n’avez jamais médité ni pratiqué de yoga, il existe un exercice accessible à tous, quel que soit votre âge et votre état de santé. A moins d’avoir le nez complètement bouché, tout le monde peut le faire : asseyez-vous sur le rebord d’une chaise, les deux pieds dans le sol et la colonne bien droite (ou en tailleur assis sur un support de méditation). Placez votre pouce droit sur votre narine droite afin de la boucher. Le reste des doigts de la main droite sont tendus vers le ciel. La main gauche est posée sur votre cuisse gauche si vous êtes assis sur une chaise ou bien sur votre genou gauche si vous êtes en tailleur. Inspirez le plus lentement possible par la narine gauche et expirez longuement par la narine gauche également. A l’inspiration vibrez mentalement le son saaaaaaat (sat : la vérité, l’authenticité), à l’expiration le son naaaaaam (nam : l’identité, l’essence). J’inspire sat, j’expire nam. On ne chante pas, on prononce mentalement le son. Cette respiration nous permet de nous connecter à l’énergie lunaire et de réaffirmer qu’il n’y a rien à faire pour exister. Il suffit juste de respirer. Restez concentré sur le souffle et sur le son que vous vibrez en silence. Pendant deux à trois minutes au moins. Cinq c’est mieux. Sept, vous allez dormir comme un bébé…

Manifester son intention de bien dormir

A force de subir des nuits difficiles, il arrive qu’on finisse par s’identifier à son trouble du sommeil. « Je suis insomniaque » entend-on parfois. Il serait plus approprié de dire « En ce moment, je souffre d’insomnie. » Prendre soin des mots que l’on emploie est essentiel pour éviter de tomber dans le piège de la croyance limitante « je souffre donc je suis ». On ne nait pas insomniaque. Si le trouble est arrivé, cela signifie aussi qu’il peut disparaitre. Changer la narration, cette petite musique qu’on joue constamment en fond sonore, a une puissance phénoménale. Lorsque je me sens coincée dans une boucle qu’on pourrait comparer à celle des nuits sans sommeil qui se répètent, je prends un moment pour choisir. Est-ce que je choisis de nourrir mon trouble ? Votre réponse sera peut-être positive. Il n’y a pas de jugement à émettre sur notre choix. Les symptômes ont toujours des bénéfices cachés. Peut-être que le manque de sommeil nous permet d’expérimenter quelque chose dont nous avons besoin pour arriver à un éveil de conscience ? Peut-être qu’on a besoin de faire l’expérience de l’insomnie à son paroxysme pour connecter une émotion enfouie à laquelle on n’a pas encore accès ? Néanmoins, si l’on en a vraiment assez de ne pas dormir, on peut en faire une déclaration solennelle à soi-même. Chaque soir avant de se coucher, on peut prononcer une prière (à vous d’écrire la vôtre sans utiliser « je dois », « il faut que », ni le temps futur ni le conditionnel. Uniquement le temps présent et des affirmations positives) : Ce soir, je choisis de dormir sereinement. Je sais que je suis en sécurité, que je suis aimé.e et soutenu.e par ma conscience supérieure qui elle-même est reliée à la conscience universelle. La qualité de mon sommeil ne dépend pas des circonstances extérieures. J’ai le pouvoir de m’autoriser le repos auquel j’aspire. J’ai le pouvoir d’accéder à la paix infinie en moi. Je choisis de nourrir mon corps du repos dont il a besoin. Vous pensez que cela ne sert à rien ? Essayez et répétez chaque soir et on en reparle !

Le pouvoir de la visualisation connectée à la pensée positive

Je suis certaine qu’il existe un paysage, imaginaire ou réel, que vous associez à une sensation de bien-être illimité. Le soir, une fois allongé dans votre lit, commencez par détendre consciemment chaque fibre de votre corps, des orteils en remontant jusqu’au sommet du crâne. Si des pensées émergent, reprenez votre scan corporel là où vous vous étiez arrêté et détendez chaque zone en prenant soin de n’en oublier aucune. Vous avez évidemment le droit de bouger pendant cet exercice, de desserrer les poings, les mâchoires, de réaligner votre bassin avec votre dos, de détendre les muscles du visage ainsi que ceux de la nuque. Si je fais cet exercice, il m’est impossible d’arriver jusqu’aux bras : je m’endors avant l’arrivée au bassin :-). Si la relaxation volontaire des muscles du corps physique ne suffit pas, attendez que votre corps soit relâché et, les yeux fermés, imaginez le paysage dans lequel vous vous sentez si bien. Visualisez les couleurs, la température de l’air ambiant sur votre peau… est-ce qu’il y a du vent ? Sentez-le frôler le duvet à la surface de votre peau. Visualisez les plantes à proximité, leur parfum, la sensation du sol sous vos pieds : s’agit-il de sable chaud ? De terre humide ? D’herbe tendre ? D’eau fraîche ou de mer chaude ? Respirez chaque détail comme si vous y étiez. Les cellules de votre corps physique n’ont pas d’yeux : elles ne savent pas si votre visualisation est réelle ou non, si vous êtes dans ce paysage sur un plan matériel ou imaginaire. En revanche, votre sensation de bien-être est complètement palpable pour elles. Elle déclenche une avalanche de réactions positives dans votre corps. Concentrez-vous sur cette sensation positive. C’est la réalité que vous êtes en train de créer pour vous-même. Si vous n’êtes pas déjà endormis, laissez-vous complètement submerger par cette détente profonde. Ce lieu est le vôtre, vous y êtes en parfaite sécurité. Vous pouvez y rester toute la nuit…

Photographie Lili Barbery-Coulon. C’est cet endroit que je visualise quand j’ai besoin de détendre chacune de mes fibres

Un mantra pour se libérer des peurs

Si vous avez identifié que l’émotion principale qui vous empêche de dormir est la peur (c’est souvent le cas… d’ailleurs, même derrière la colère, il y a souvent la peur), vous pouvez écouter et chanter le mantra Chattra Chakkra Vartee. Il n’est pas facile à apprendre, d’autant qu’il faut insister sur la prononciation avec sa langue et en roulant les R pour bénéficier des effets sur les méridiens situés à la surface du palais. Voici le mantra :

Chattra Chakkra Vartee, Chattra Chakkra Bhugatay, Suyambhav Subhang Sarab Daa, Saraab Jugatay. Dukaalan Pranasee, Diaalang Saroopay, Sadaa Ang Sangay, Abhangang Bibhutaay…

Il dit que ce qui est sacré en nous s’étend dans toutes les directions, au nord, au sud, à l’est et à l’ouest, nous sommes unis à l’univers tout entier, ce qui est sacré en nous est l’incarnation de la compassion, c’est toujours là, présent, lumineux et cela nous donne des pouvoirs invincibles. La prononciation phonétique est : Tchatr Tchakr Varti, Tchatr Tchakr Bhougté, Souyambhav Soubhang, Sarab Daa Saraab Djougté, Doukaalan Parnassi, Diaalang Saroupé, Sadaa Ang Sangué, Abhangang Bibhouté. Vous pouvez le chanter assis, les mains en gyan mudra (pouce et index joints). Il y a d’autres mudras mais il faudrait que je fasse des photos pour vous montrer et j’ai la flemme :-). L’idéal est de chanter ce mantra avec révérence, en ayant ouvert l’espace avec le mantra ong namo guru dev namo et en le fermant après le chant avec trois « sat nam ». Néanmoins, si vous avez envie de chanter ce mantra en coupant des légumes le soir dans la cuisine ou bien si vous vous contentez de l’écouter en prenant votre bain, c’est déjà très bien. S’il vous plait, n’hésitez pas à vous engager à le chanter pendant 40 jours, 7 minutes par jour. Voici quelques versions que vous trouverez sur la plupart des plateformes de musique digitale, choisissez les mélodies les plus douces si vous comptez chanter le mantra le soir (j’adore la version de Simrit qui s’appelle CCV également tout comme la version d’Ajeet Kaur qu’on trouve aisément sur Youtube).

Voilà, vous avez à présent plein d’outils. A vous d’adopter celui ou ceux qui résonnent avec vos besoins.