Se souhaiter le meilleur…
Photographie Lili Barbery-Coulon. Cours d'ikebana au Pavillon Miwa

Se souhaiter le meilleur…

Se souhaiter le meilleur…

On est déjà le 15 janvier et je me rends compte que je ne vous ai toujours pas souhaité une bonne année. Alors Happy 2013 à tous. Je ne suis pas très douée pour ces vœux mais j’aime l’idée qu’on puisse espérer le meilleur pour ceux qu’on aime. En décembre, j’ai eu la chance d’assister à une cérémonie du cadeau au Pavillon Miwa. Dédié aux dingues de culture japonaise, cet espace hybride qui a ouvert en novembre 2012 est à la fois une boutique, un lieu de rencontre et un club très privé. Si vous souhaitez en savoir plus, je vous recommande de lire l’article que j’ai écrit au sujet de l’origata (la cérémonie du cadeau) dans M, le magazine du Monde. J’ai rarement eu l’occasion d’observer un spectacle aussi délicat, de la cérémonie du thé par laquelle nous avons commencé jusqu’au pliage du papier, j’ai été très émue. En regardant cette chorégraphie parfaitement exécutée, j’avais envie de redresser ma colonne vertébrale pour être à la hauteur de cette beauté, d’être, en retour, aussi bien élevée qu’un membre de la famille Crawley dans Dowton Abbey.

Photographies lili barbery-coulon. On commence par former un cylindre de paille avec de la ficelle… Le diamètre dépendra de la taille du vase.

Car tous ces gestes, ces codes n’ont qu’un seul but : concentrer les meilleures intentions à l’intérieur du cadeau que l’on souhaite faire. Dire autrement qu’avec des mots qu’on tient à l’autre. Pour assister à cette cérémonie et faire emballer un objet de son choix, il faut être membre du club Miwa, cependant tous les samedis, le lieu se transforme en boutique (c’est très petit) ouverte à tous les curieux en quête d’objets rares et insolites. Les membres du club auront aussi accès à des rencontres avec des personnalités d’exception venues du Japon. Experts dans leur domaine, ils viendront échanger avec les adhérents chanceux (l’espace ne peut pas accueillir plus de 8 personnes en même temps) à propos de leur spécialité. Afin de me présenter son projet, le créateur de Miwa, Takeshi Sato a eu la gentillesse de m’inviter à l’une de ces rencontres. J’ai ainsi eu le privilège de prendre un cours d’ikebana (la tradition de l’arrangement floral) avec une galeriste japonaise, Mika Seki, qui collectionne et vend des vases très anciens à Ginza et à New York.

Photographie lili barbery-coulon

Après nous avoir expliqué le sens de l’art floral au Japon, ses racines et son histoire, elle nous a montré comment obtenir avec quelques branches un bouquet délicat. D’abord, il faut créer un socle dans lequel on va planter la matière végétale. En France, les compositions florales, les centres de table, sont presque toujours constitués de mousse humide. Au Japon, on utilise de la paille : on en rassemble une grosse poignée avec de la ficelle et on coupe à chaque extrémité afin de former un tube. On le fait tremper dans de l’eau bouillante puis on le laisse sécher. Une fois sec, ce cylindre de paille ne bougera plus (d’après notre enseignante), même inondé dans l’eau d’un vase. Encore faut-il trouver de la paille à Paris ! La japonaise qui s’occupe habituellement de la cérémonie du cadeau s’occupait de traduire les explications de la galeriste et nous a confié qu’elle avait trouvé la paille dans une fromagerie. Ca m’a amusé de l’imaginer en train d’acheter des dizaines de chèvre pour récupérer quelques brins. Ensuite, il n’y a plus qu’à planter dans la paille, une branche ou deux, une fleur peut être, en gardant à l’esprit que cette colonne de paille représente le cœur de notre projet. Comme un arbre de vie. Un cœur qui bat à l’intérieur d’un vase.

Photographie lili barbery-coulon.
Quelques illustrations anciennes qui montrent comment on peut assembler différentes branches

L’idée c’est de planter des éléments végétaux différents qui ont des hauteurs variées. L’une partira vers la gauche, l’autre formera un petit massif à mi hauteur et la dernière s’élèvera en direction du ciel. Bien sûr, chaque direction a une signification et je dois probablement épouvanter les connaisseurs en vulgarisant ainsi une tradition aussi ancienne. La galeriste nous a dit qu’au Japon, on arrose aussi la surface des pétales. Pas pour hydrater les fleurs. Mais pour simuler la beauté de la rosée naturelle. On les vaporise juste avant la venue des invités pour leur montrer combien on a envie d’honorer leur visite. Encore des gestes silencieux pour dire, autrement qu’avec des mots, qu’on tient aux autres. Je ne sais pas pourquoi cela me touche autant mais ça résonne en moi. J’espère que vous aurez autant d’émotion que moi en découvrant les petits objets à vendre le samedi : la pureté de ces verres si fins qu’ils donnent à l’eau un aspect précieux, ces petits cure dents en bois sacré qui sont enroulés dans un haïku écrit en japonais ou encore ces minuscules enveloppes en papier fabriqué à la main. Toute cette bienveillance contenue dans le banal. De quoi réveiller le meilleur en nous.

Photographie lili barbery-coulon

Miwa, Pavillon de la Cérémonie du Cadeau, 12 rue Jacob, Paris 6e, Tel : 01 46 33 00 33, ouvert à tous le samedi de 11h à 19h, réservé aux membres du mardi au vendredi de 11h à 19h