Liberté, la pâtisserie-boulangerie de Benoit Castel
photographie lili barbery-coulon

Liberté, la pâtisserie-boulangerie de Benoit Castel

Liberté, la pâtisserie-boulangerie de Benoit Castel

Le quartier autour du Canal Saint Martin est vraiment devenu l’équivalent parisien du Lower East Side à New York. Ou de Shoreditch à Londres. Ou encore d’Abbot Kinney Boulevard à Los Angeles… Chaque semaine, une nouvelle adresse branchée ouvre avec une typographie irréprochable et une architecture intérieure à la pointe. Sur quelques voies – la rue de Lancry, la rue de Marseille, la rue Lucien Sampaix, la rue Yves Toudic ou encore la rue des Vinaigriers – on retrouve toutes les tendances gourmandes du moment, du burger aux meatballs en passant par le jus de légumes pressés à froid et le latte de barista. C’est à la fois enthousiasmant et un peu angoissant car, comme le journaliste Thomas Chatterton Williams le demandait dans son article « How Hipsters Ruined Paris » (8 novembre 2013, New York Times Sunday Review), est-ce qu’on ne serait pas en train d’uniformiser tous les quartiers populaires des grandes villes en y proposant « le même brunch pour tous » ? Vous trouvez sans doute que je suis pleine de contradictions puisque je ne cesse de recommander des adresses de ce genre sur Ma Récréation. Mais je me pose sincèrement la question. Quelle différence existe-t-il entre l’uniformisation des centres commerciaux des grandes villes avec la même galerie de boutiques (Zara, Gap, Starbucks Coffee, McDonald’s…) et la standardisation des quartiers de hipsters ?

Photographie Lili Barbery-Coulon.
La vitrine de la pâtisserie Liberté et le quartier branché du 10e arrondissement s’y reflétant.

Je ne fais pas partie des gens qui disent que c’était mieux avant. Je ne regrette pas les brasseries répugnantes où l’on ne pouvait pas aller faire pipi sans s’évanouir et où l’on se faisait insulter lorsqu’on avait le malheur de réclamer un verre d’eau (sale) avec son (marc) de café serré. Je n’ai pas non plus la larme à l’œil quand je pense à tous les sandwichs au pain rassis à peine beurré que j’ai du me fader les jours où je n’avais pas le temps de déjeuner. Que les touristes se rassurent : on trouve encore ces « merveilles » dans la plupart des boulangeries à Paris. Je trouve réjouissant que la culture tumblr et les réseaux sociaux comme Pinterest permettent de partager plus vite les bonnes idées avec un plus grand nombre. Mais, mais, mais : j’ai encore envie de croire que la ville que j’habite et que j’adore a une saveur particulière. Et que cela ne tient pas uniquement à son architecture et à ses taxis odieux. Je serais curieuse d’avoir votre avis sur la question ?

Photographie Lili Barbery-Coulon

Du coup, samedi, j’ai sillonné le 10e arrondissement avec toutes ces questions en tête jusqu’au moment où je suis tombée sur la pâtisserie-boulangerie Liberté. Attraction fatale. La photographe Armelle Kergall qui habite ce quartier m’avait prévenue : « Tu verras, le pain granola y est délicieux ». L’espace est immense, il y a même deux petites tables basses à l’entrée entourées de tabourets : une bonne idée pour faire patienter les enfants ou ceux qui accompagnent les gourmands. Il y a aussi des journaux pour lire les nouvelles en grignotant son croissant. Ouverte par Benoit Castel, ex pâtissier de la Grande Epicerie et propriétaire de Joséphine Bakery à Saint Germain-des-Prés, la boutique ressemble plus à une cuisine professionnelle qu’à un espace de vente. Derrière le grand bloc de marbre qui fait office de comptoir, on aperçoit l’atelier où sont confectionnées toutes ces douceurs. Un tic de l’époque puisque tout le monde cherche à montrer la confection. Les cuisines s’ouvrent dans les restaurants, les confiseries mettent leurs chocolatiers en vitrine et au Bon Marché, on peut désormais regarder le boulanger préparer ses croissants en direct rue du Bac.

Photographie Lili Barbery-Coulon

Si vous êtes un fidèle de Joséphine Bakery, vous reconnaitrez sans doute les meringues en forme de cupcakes et les sablés carrés. J’ai acheté plein de gourmandises qu’on a partagées en famille avec des enfants de 5 à 9 ans qui se sont prêtés religieusement au test. Les adultes ont adoré le flan à la vanille, les enfants ont réservé un Oscar au pain au chocolat, ma fille a dévoré l’éclair au chocolat (la crème est très réussie). J’ai moins aimé le moelleux au chocolat (d’ailleurs c’est le seul gâteau qui n’a pas été terminé). Je n’ai pas testé les tartes au citron, qui ressemblent beaucoup visuellement à celles proposées chez Thoumieux, ni la tarte à la crème, la spécialité des lieux. En revanche, je suis d’accord avec Armelle : le pain granola, truffé de noisettes, de raisins secs, et de noix, est une tuerie. Une adresse à savourer sans modération.

4€ la pâtisserie individuelle en moyenne, Liberté la pâtisserie boulangerie par Benoit Castel, 39 rue des Vinaigriers, Paris 10e Tel : 01 42 05 51 76 et sur Facebook