La beauté made in Japan
Photographie M/B pour Lili Barbery-Coulon

La beauté made in Japan

La beauté made in Japan


Si vous avez l’habitude de me suivre, vous savez combien je suis fan du travail visuel de mes deux amies Marine de Bouchony et Camille de Laurens qui ont fondé l’agence M/B. Si vous n’avez pas remarqué les photographies qu’elles ont conçues pour moi dans la rubrique beauté Lili Loves de ce blog, vous avez peut-être déjà repéré leurs images dans le supplément enfants de Marie-Claire, sur le site The Socialite Family  où elles viennent de signer une sublime série ou encore aux Galeries Lafayette où elles ont récemment mis en scène la ligne de vêtements Galeries Lafayette par Laetitia Ivanez à l’occasion de l’exposition L’Elégance Engagée . J’ai beaucoup de chance de les avoir pour amies parce qu’en plus d’avoir un talent indéniable, elles sont fidèles et extrêmement drôles. Alors quand elles m’ont dit qu’elles voulaient profiter d’un voyage au Japon pour réaliser une série pour moi, j’ai bondi de joie ! Elles ont embarqué dans leurs valises leur matos photo et une tripotée de produits japonais que je leur ai confiés afin qu’elles les capturent in situ. Ca aurait sans doute été plus simple de faire livrer cette sélection à leur arrivée à Tokyo, mais dès le premier email envoyé aux bureaux de presse japonais, j’ai compris qu’il fallait mieux se débrouiller avec les bureaux Parisiens ☺…


Photographies M/B. Shampooing W Wake Up de Uka (au Bon Marché)


Camille et Marine sont allées à Tokyo et sur l’île que je rêve de visiter un jour : Naoshima. Elles sont revenues avec plusieurs centaines d’images et ont compilé un carnet d’inspirations rien que pour nous. Un kaléidoscope poétique et sensible où les produits de beauté font écho à l’architecture épurée, aux kimonos fleuris, aux sourires pudiques et aux minéraux. Je ne leur ai rien dit des produits qu’elles ont emportés. Elles avaient carte blanche pour en faire ce qu’elles souhaitaient. Voici cependant quelques mots sur ces soins que j’aime tout particulièrement.


Photographies M/B. A gauche : l’huile démaquillage Ruhaku, à droite l’huile pour les ongles Uka


Lorsqu’on arrive au Japon et qu’on vient d’Europe, on est d’abord frappé par l’extrême propreté des trottoirs, des espaces publics et des toilettes. J’ai écrit il y a plusieurs années un article pour M le magazine du Monde sur notre rapport à l’hygiène et ce qu’il dit de nos héritages culturels. Les Français ont la réputation d’être sales. On a longtemps craint l’eau qui, insalubre, véhiculait de nombreuses maladies. De ces peurs ancrées dans notre histoire, nous avons hérité d’un certain nombre de croyances – « Trop se laver est mauvais pour la santé » par exemple – et il faut attendre le début des années 2000 pour que 100% des appartements français soient équipés d’une véritable salle de bain. L’appartement dans lequel je vis (construit au XIXe siècle) ne disposait d’ailleurs toujours pas de salle de bain lorsque je l’ai visité en 2015. Il y avait bien un bac à côté de l’évier dans la cuisine pour faire une « toilette de chat« , mais pas de pièce fermée avec une baignoire ou une douche… Aux Etats-Unis, c’est exactement l’inverse. On est obsédé par l’hygiène. Les déodorants américains (comme ceux qu’on trouve en Angleterre) contiennent plus de produits actifs pour bloquer la transpiration qu’en France ! Nos dents « jaunissantes » versus le sourire javellisé proposé par tous les dentistes Californiens les dégoûtent. Et on se lave bien plus souvent les cheveux chez eux qu’ici. Je pourrais vous retrouver des études sur le sujet, c’est édifiant. L’obsession repose sur l’idée que les individus qui nous entourent nous contaminent avec leurs microbes et qu’il faut absolument se nettoyer rigoureusement pour éviter de tomber malade en laissant coloniser son territoire (la notion de propriété y est très puissante) par les germes d’autrui. Je caricature bien sûr mais il n’est pas étonnant qu’ils soient à l’origine de la microdermabrasion, des brosses visage nettoyantes ni qu’ils consomment des litres de gel hydro-alcooliques pour les mains.



Photographies M/B. Coffret anniversaire de 7 poudres de riz dans leurs emballages d’origine par Shiseido, édité à 9000 exemplaires


Au Japon aussi, on se lave bien plus qu’en France. La douche deux fois par jour n’a rien de rare (alors qu’en France une douche quotidienne semble la norme, même si j’en connais qui se situent en dessous de cette moyenne…) et les shampooings sont même formulés pour deux à trois lavages de cheveux quotidiens ! Le rituel nettoyant du visage est pris très au sérieux, il est effectué le matin et le soir et les Japonaises utilisent bien plus de produits que nous pour se démaquiller : une huile, une mousse, parfois un lait et une lotion. Quand on leur raconte que beaucoup de Françaises se contentent d’un coton d’eau micellaire le soir (dans le meilleur des cas), elles ont des hauts le cœur. Ce qui les pousse à accorder autant d’importance à leur toilette quotidienne n’a rien à voir avec l’héritage individualiste de la société nord-américaine. Ici, au contraire, il s’agit de respecter le groupe dans lequel on évolue. Ne pas incommoder les autres avec une odeur désagréable ou une haleine nauséabonde (il utilise des brosses à langues en plus des brosses à dents et du fil dentaire). Ne pas se faire remarquer avec une peau imparfaite. En outre, les bains publics ne sont pas anecdotiques. Ils font partie intégrante de la culture locale. Et puis, la beauté est assimilée à la pureté, l’impeccabilité, le teint immaculé, le cheveu soyeux… alors que du côté des Parisiennes, beaucoup ont tendance à se décoiffer en sortant de chez le coiffeur pour ne pas avoir l’air trop sophistiqué… J’écris tout ceci sans aucun jugement. Je ne fais que schématiser des réflexes culturels (évidemment, il y a des obsédés de la propreté en France et des individus négligés au Japon… je force le trait pour contextualiser mon propos…).


Photographies par M/B. Le pochon Manakai qui contient deux sachets à laisser infuser dans le bain (au Bon Marché)


L’industrie de la beauté considère les Japonaises comme des expertes de la cosmétique. Elle les hisse bien souvent sur un piédestal et même si désormais elle s’inspire plus des maniaqueries des Coréennes du Sud que des Tokyoïtes, les Japonaises continuent d’être des références pour les marques. J’ai longtemps pensé que la force de la cosmétique nippone était concentrée dans sa maitrise des poudres et autres pigments pour le teint. Les fonds de teint Shiseido , par exemple, sont plébiscités par les maquilleurs de studio qui ont l’occasion de tester tout ce qui est disponible sur le marché. La marque vient d’ailleurs d’éditer un coffret anniversaire de 7 poudres inspirées d’une innovation de 1917 : une gamme chromatique arc en ciel pour corriger toutes les irrégularités de la peau (du vert pour cacher les zones rouges ou roses, du violet pour absorber la fatigue…). Ils ont sorti une réinterprétation contemporaine qui réunit les sept teintes (Poudre Lumière 7 couleurs ) et un coffret à l’allure vintage, photographié par Marine et Camille un peu plus haut. Je ne crois pas que je vais oser utiliser ces poudres enveloppées dans de si jolis écrins. C’est vraiment un objet de collectionneur (180 euros, édité à 9000 exemplaires seulement) à conserver sur une coiffeuse. Mais la finesse de la poudre et les teintes délicates devraient plaire aux dingues de teint porcelaine.



Photographies M/B. A gauche : l’une des huiles pour les ongles de Uka. A droite, la crème ultra hydratante de Ruhaku


Les marques de beauté japonaises se distinguent aussi pas la qualité de leurs textures. Les femmes au Japon sont en quête de sensations évanescentes sur la peau, de crèmes métamorphiques, de gels imperceptibles. Nos baumes « huileux » adorés ? Très peu pour elles. Parallèlement, l’industrie de la beauté là-bas a souvent un temps d’avance en ce qui concerne les gadgets pour se masser ou se nettoyer le visage efficacement. Mais la grande nouveauté depuis quelques années, ce sont leurs créations à base d’ingrédients naturels. L’intérêt pour les formules bio grandit progressivement et lors de mon dernier voyage au Japon, j’ai repéré plein de nouveaux labels organiques ou à base de plantes. Je vous avais d’ailleurs parlé du concept store The Beauty Library  dans le quartier d’Omotesando, qui ne propose que des produits de beauté bio. Parmi mes marques japonaises naturelles préférées, il y a Uka bien sûr. Fondée par la célèbre manucure Kiho Watanabe, la ligne Uka s’est d’abord fait connaître avec une collection d’huiles végétales bio sous formes de roll-on pour les ongles. Si vous avez les ongles détruits par une overdose de vernis semi-permanent ou un polissoir agressif, vous allez adorer ces huiles. D’abord elles sentent les plantes aromatiques et les essences d’épices. Ensuite, elles réparent et métamorphosent l’ongle en quelques jours, à condition d’appliquer le roll-on de son choix sur les cuticules plusieurs fois dans la journée. Je connais même des guitaristes qui l’utilisent pour renforcer leurs ongles ! C’est vraiment bluffant. La marque a ensuite développé une série de produits pour les mains et plus récemment des produits pour les cheveux. Leurs shampooings sont démentiels ! Toujours la même exigence en terme de formulation (si vous cherchez des senteurs de fruits ou de musc blanc, vous allez être déçus : ces soins capillaires sentent le spa et les huiles essentielles). Sur mes cheveux fins qui ont tendance à graisser trop vite, le shampooing W Wake Up ! fait des merveilles. Il est tonifiant, il n’alourdit pas et il donne du volume. Pile ce que j’aime (vendu en ligne chez Colette et au Bon Marché ).

Photographie M/B

Ruhaku est une autre marque bio qui s’est récemment lancée en France. Elle est originaire d’Okinawa, une curiosité pour tous ceux qui s’intéressent à la longévité : elle concentre un nombre impressionnant de centenaires en bonne santé. Même phénomène inoui au Costa Rica, à Icaria en Grèce ou encore en Sardaigne : ces lieux inhabituels de longévité ont été surnommés les « zones bleues » et elles ont inspiré la marque Chanel qui a étudié pendant plusieurs années le lifestyle de ces centenaires pour formuler son dernier soin global Blue Serum. Ruhaku est une contraction du nom Ryukyu (l’ancien nom d’Okinawa) et Bihaku qui signifie « peau claire et souple ». Toute la ligne pour le visage contient un ingrédient d’Okinawa, l’huile de feuille de getto (ou gettou selon les traductions), qui aurait des propriétés miraculeuses sur la longévité de la peau. Je me méfie toujours des revendications « miraculeuses » : il n’y a pas de produit miraculeux pour la peau, il y a des produits qui nous conviennent, d’autres non. Leur huile démaquillante  ne contient que 10% d’ingrédients bio mais 100% des ingrédients sont naturels et elle est très confortable. Leur crème pour le visage est conçue pour hydrater les peaux qui évoluent dans des environnements secs (bureau climatisé, vols longs courriers, montagne…) et réparer les épidermes fragilisés. Je n’ai testé que l’huile démaquillante mais j’ai noté que le soin visage était nettement plus concentré en ingrédients bio (la formule avoisine les 80% d’ingrédients bio et 99% d’ingrédients naturels).

Photographie M/B


Enfin, la dernière marque à figurer dans cette série est Makanai. Je n’ai encore jamais essayé leurs soins pour le visage mais je suis folle de leurs sachets d’herbes, d’écorces et de fleurs séchées pour le bain. Le rituel du bain au Japon n’a rien à voir avec le notre. On se lave consciencieusement avant de se plonger dans un bain. Pas question d’infuser dans nos propres microbes. On se nettoie, on se brosse et ensuite seulement on s’assoit dans un bain chaud dans lequel on peut plonger un petit sachet d’herbes et de son de riz enfermé dans un pochon imprimé. La marque recommande de le laisser sécher après le bain afin de le réutiliser pour parfumer les penderies (la variété au yuzu coûte 14€ les 2 sachets à plonger dans le bain au Bon Marché ). J’aurais aussi pu vous parler de la marque Shu Uemura , rachetée par le groupe L’Oréal, qui dispose de formules géniales pour se maquiller, du Masque de Mousse de la marque Evidens de Beauté, des gels douche Three ou encore des soins bien-être de Chico Shigeta et des limes pour les ongles Kobako (leurs limes à angle triangulaire sont démentes). La liste était bien trop longue pour tout caser dans la valise des M/B. Néanmoins, j’espère que ce sujet vous donnera envie de découvrir la beauté made in Japan et surtout ce pays envoutant dans lequel je voudrais pouvoir me rendre tous les mois.


Et vous, quels sont vos produits de beauté japonais préférés ?