En chantier…
photographie lili barbery-coulon

En chantier…

En chantier…

Bien sûr, on m’avait prévenue. « Bon courage pour les travaux »… Je savais que cette période allait me sembler interminable. Lorsqu’on me demande quand je vais enfin emménager, je ne donne même plus de réponse. Ce dont je ne me souvenais pas, c’est que lorsqu’on entame des travaux, il n’y a pas que son nid qui est en chantier. Sa tête aussi. On a de la poussière de ciment plein le crane et des câbles qui pendent au plafond. Il y a évidemment des tâches hyper excitantes comme choisir ses couleurs chez Farrow and Ball, dessiner la bibliothèque sur mesure dont on a toujours rêvé. Et puis, il y a cette to-do liste interminable qui oblige à zoner chez Leroy-Merlin le samedi après-midi ou encore à péter les plombs devant le logiciel Ikea, sensé vous aider à concevoir votre cuisine (à ce sujet, je vous conseille la lecture d’un article hilarant sur lemonde.fr) sans parler des questions existentielles comme « A quelle hauteur vous voulez votre interrupteur ? » auxquelles vous ne pouvez décemment pas répondre : « Je m’en cogne ».

Le chantier, je vous dis. D’autant qu’avant de faire le moindre carton, j’ai décidé d’appliquer la méthode Konmari à la lettre. Je jette par sacs de 100 litres, mes cours d’anglais d’il y a vingt ans, les facturettes de carte bleue (je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi j’ai gardé aussi longtemps ces papiers)… Quant aux beaux livres commandés sur Internet et jamais ouverts, ils font la joie de ceux qui les ramassent dans la rue. Un grand nettoyage par le vide. Si vous n’avez pas encore lu son livre La Magie du Rangement, je vous le recommande vivement. Je l’ai dévoré cet été et je ne rêvais que d’une chose : rentrer chez moi pour tout balancer (je sens une légère inquiétude à mon sujet derrière votre écran). Toutes ces choses dont on s’entoure et auxquelles on s’accroche sans plus savoir vraiment pourquoi… Je n’avais pas conscience que je vivais avec autant d’objets inutiles. Son principe : ne garder que ce qui donne de la joie. On commence par les vêtements puis les livres, les objets fonctionnels, les papiers et enfin les objets personnels. Elle ne dit pas combien de temps il faut pour s’occuper de cette première phase de tri : moi je vous le dis, il me faudrait un mois à temps plein pour scanner chaque centimètre carré de mon appartement. Ensuite, quand on a fini de faire le vide, on se met à ranger. Et pas n’importe comment. Oubliez les piles au carré dans votre dressing : elles sont, d’après elle, idéales en boutiques où les vendeuses ont le temps de les remettre en place non stop (je le sais, j’ai bossé chez Gap et j’ai plié des tonnes de maille au folder…) mais très peu pratiques au quotidien chez soi : on ne porte que ce qui est en haut de la pile et on oublie les t-shirts écrasés en dessous qui finissent par jaunir sur la tranche. Sa solution consiste à utiliser le plus possible les tiroirs et plier tout ce qu’on peut en rectangle posé sur la tranche. Allez voir une vidéo de cette monomaniaque juste ici pour comprendre. Bon, je vous l’accorde, elle est complètement folle ! Mais je suis tellement loin de son niveau que je ne peux que progresser en m’inspirant de son discours. D’autant qu’il résonne en moi. Par exemple, le chapitre consacré aux effets personnels nous donne des clés pour comprendre notre attachement aux objets. La plupart du temps, on se cramponne à des vieux souvenirs qui nous rappellent notre passé ou bien à des objets dont on a aucune utilité mais dont on espère se servir un jour (une jupe trop petite, une centrifugeuse qu’on sortira peut-être dans deux ans pour faire des jus frais…). Et finalement, on n’est jamais ancré dans son présent. Faire le vide permet de mieux se situer. C’est assez proche d’une méditation en pleine conscience. En se séparant de sa nostalgie ou de ses espoirs pour l’avenir, on s’installe dans le présent et l’on connaît mieux ses besoins. Marie Kondo promet des bénéfices délirants après le rangement. On verra, je vous tiendrai au courant s’il m’arrive des trucs fous fous fous dans les semaines à venir. En revanche, je lui laisse bien volontiers les petites manies du genre sécher les flacons de gel douche et de shampooing avec une serviette propre et les ranger après chaque bain afin qu’ils évitent de salir le rebord de la baignoire. Ou encore vider son sac à main en rentrant et saluer sa maison en lui parlant à haute voix… Sans déconner !