Cire de luxe
Photographie Lili Barbery-Coulon

Cire de luxe

Cire de luxe

Photographies lili barbery-coulon

Aujourd’hui, tout le monde développe sa ligne de bougies parfumées. Du restaurant à l’hôtel, en passant par les boutiques de mode ou de mobilier, je ne serais pas étonnée d’en découvrir une estampillée au nom du charcutier du coin. Il faut dire que ce produit abordable est nettement moins engageant qu’un parfum sur la peau et qu’on arrive toujours à le caser dans une maison, même quand on n’est pas dingue de son odeur. Parmi la quantité phénoménale de bougies odorantes disponibles dans le commerce, quelques enseignes, comme Astier de Villatte, Diptyque ou Cire Trudon ont pourtant le don d’upgrader l’atmosphère d’un appartement. Il y a plusieurs semaines, j’ai eu la chance de visiter l’usine d’un des plus beaux ciriers français. La société Cir fabrique les bougies Cire Trudon et une quantité phénoménale de cires parfumées pour les plus grandes marques (que je n’ai pas le droit de citer).

Photographies lili barbery-coulon

J’ai déjà parlé de cette maison dans le carnet d’adresses beauté de Ma Récré. A l’époque, Cire Trudon s’apprêtait à ouvrir une boutique à New York sous la direction de Ramdane Touhami qui a orchestré la renaissance de cette vieille enseigne de 2007 à 2011. Depuis son départ, la manufacture installée dans le Perche continue de mettre au point les cierges fluo, les bustes en cire d’abeille et les bougies odorantes qui ont fait le succès de Trudon. Un lieu perdu au milieu de la campagne où les vapeurs de parfums en combustion enveloppent le visiteur dès l’entrée. A l’abri du bruit et des effluves, c’est la partie droite de l’usine qui m’a le plus enthousiasmée. Un atelier artisanal où l’on reproduit à la main les bustes en cire. Cire Trudon ne dispose que de quelques moules prêtés par les musées nationaux. Un nombre limité qui rend la surproduction impossible. Une ouvrière au geste sûr coule délicatement la matière colorée à l’intérieur du moule et après plusieurs heures de séchage, elle libère l’objet de son armure et passe à la dernière étape : lisser toute la surface de la bougie en grattant soigneusement les aspérités comme un peeling de la peau. Derrière elle, une employée trempe des cierges dans des bains d’argent pendant qu’un autre prépare les commandes spéciales avec des lettres assemblées à la main.

Photographies lili barbery-coulon. l’atelier moulage et peeling des bustes issus de la Réunion des Musées Nationaux

Dans l’autre partie de l’usine, l’experte olfactive teste la performance des bougies en cours de fabrication. Un autel où brulent les dizaines de variétés de cires en cours de fabrication. Ma résistance dans cette grande salle était limitée vu la puissance des essences. C’est pourtant là où tout se passe : la pesée des matières premières parfumées, le collage des mèches au fond du verre, le remplissage des verres, la découpe des mèches… La plupart des opérations sont faites à la main, que ce soit pour la réalisation des bougies Cire Trudon ou pour les autres marques. Des heures à vérifier l’alignement des étiquettes, la verticalité des mèches avant que la cire ne soit figée et le nombre de centimètres requis pour un brûlage idéal. Autant de gestes que je croyais automatisés. Depuis cette visite, je n’ai plus du tout la même perception de ce produit odorant lorsque j’allume une mèche pour parfumer mon salon. Je pense aux mains. A toutes ces mains qui répètent chaque jour la même chorégraphie.Même les bougies ont parfois un supplément d’âme…